07/10/2009
Le Problème avec les lapins | Emily GRAVETT
Traduit de l'anglais par Elisabeth Duval
Éd. Kaleïdoscope | septembre 2009 | 18€
Janvier, champ Fibbonacci: le lapin Cœur-à-Prendre se languit sur le gazon et invite tout rongeur aux longues oreilles à le rejoindre.
Février, champ Fibonacci: Cœur-à-prendre et Gros Lapin Blanc, frigorifiés, tricotent et se pelotonnent.
Mars: Cœur-à-Prendre et Gros Lapin Blanc ont le bonheur de vous annoncer la naissance de deux lapereaux rebondis, Perce-Neige et Trèfle. On leur souhaite la bienvenue dans le champ Fibonacci!
Le problème avec les lapins, c'est qu'ils ont tendance à exagérer. Si chacun sait que la règle de base de la reproduction sexuée équivaut à 1+1= 3, chez les lapins, le résultat de ce postulat double dès le départ. Ceci posé, en tenant compte des variables saisonnières (ennui, chaleur estivale…) et de la constante propre à l'espèce (super fertilité), combien de lapins y aura-t-il dans le champ Fibonacci au mois de décembre? Et, plus important encore, combien de lapins un champ peut-il contenir? Et une page? Le problème avec les lapins, c'est que les lois régissant les espaces clos, ils s'en soucient comme de leur première carotte…
Le dernier opus d'Emily Gravett prend la forme d'un calendrier truculent où le lecteur voit évoluer la population du champ Fibonacci au rythme des saisons: pluies printanières, récoltes de septembre, il s'en passe des choses dans la vie de nos sympathiques rongeurs! Comme à son habitude, l'auteur joue avec le format choisi, agrémentant son calendrier de livrets pour nous faire découvrir recettes de carottes, faire-part, post-it… jusqu'à la surprise finale!
Nathalie Ventax (octobre 2009)
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14/09/2009
L'Été de Garmann | album de Stian HOLE
Traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud
Éd. Albin Michel, mars 2008 - 12,50 €
Bienvenue chez Garmann: un petit garçon de six ans aux cheveux blancs tellement ils sont blonds, des tâches de rousseurs sur le nez et le bronzage de quelqu'un qui vient de passer son été au grand air… Malheureusement pour Garmann, l'été s'achève et c'est bientôt le moment de la terrifiante rentrée en CP. C'est aussi le moment qu'ont choisi les trois vieilles tantes pour rendre visite à la famille: elles sont vieilles, ridées, ratatinées, elles ont des dentiers, de l'arthrose, elles perdent un peu la boule, mais on peut dire qu'elles ont la pêche! C'est grâce à elles que Garmann va réussir à parler de sa peur au reste de la famille: il n'a perdu aucune dent de lait et se sent bien moins prêt pour le CP que les intrépides jumelles Hanne et Johanne.
On parle de tout dans cet album intimiste empreint de nostalgie: de la peur, de la mort, de la séparation, le tout avec pudeur, tendresse et humour. L'illustration qui mêle photos, dessins, collages est baignée d'une lumière absolument magnifique et concourt à rendre à l'évocation de cette fin d'été très particulière. On n'oublie pas Garmann et ses vieilles tantes, bien après avoir refermé le livre.
Nathalie Ventax
(Date de première publication de l'article : 17 avril 2008)
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30/08/2009
Quand nous aurons mangé la planète | album d'Alain SERRES & Silvia BONANNI
Éd. Rue du Monde | juin 2009 - 14€
Quand nous aurons mangé la planète est une variation sur l'adresse des Indiens Cree aux colons nord-américains: «Quand le dernier arbre aura été abattu et le dernier poisson pêché, alors vous vous rendrez compte que l'argent ne se mange pas». Les richesses environnementales que nous sommes désormais en mesure de détruire sont illustrées une par une (banquise, forêts, animaux) dans la première partie de l'ouvrage. Viennent ensuite les conséquences de cet usage inconsidéré: les êtres humains sont devenus des Midas, incapables de manger l'argent et l'or qui sont tout ce qui leur reste. La situation – traitée graphiquement de manière moins catastrophiste que dans le texte – est dépassée par la présence possible d'un enfant «aux poches remplies de graines de vie».
Silvia Bonanni tire parti de l'organisation thématique du propos pour construire des doubles pages dont chacune a sa couleur et son ambiance visuelle. Elle travaille avec le collage, qui lui permet de faire entrer dans l'album des objets bruts, éléments tantôt naturels, tantôt artificiels, sans logique apparente. Le feuillage d'un arbre peut être figuré avec un tissu ou la carte routière d'une campagne, tandis que les billes de bois sont faites de bois. Le résultat consiste en de grands tableaux sans relief et d'apparence naïve, qui donnent une impression d'étrangeté.
Le propos d'Alain Serres répond-il à l'ambition affichée en quatrième de couverture, à savoir écrire «une histoire qui donne envie aux enfants de faire tourner la planète un peu plus rond»? On a du mal à comprendre comment cet objet très beau, bâti autour d'un paradoxe exprimé avec une grande force, peut être aussi œuvre didactique. Ou bien il faudra l'accompagner, pour expliquer aux plus petits comment l'être humain peut menacer d'engloutir les dernières glaces de cette banquise où il ne figure pas. Et qui est ce «nous» mystérieux et culpabilisant qui mange ainsi la planète…
Aude Vidal (juillet 2009)
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Le Voyage d'Henry | album de Donald B. JOHNSON
Éd. Casterman, coll. Les albums Duculot, 2001 et 2007 - 13,95€
[EO: Henry hikes to Fitchburg, 2000]
Voici un album jeunesse passé inaperçu en France, malgré son accueil enthousiaste aux USA: meilleur album jeunesse de l’année d’après le New York Times, belles ventes et depuis l’ouvrage se voit consacrer une page sur Wikipedia. C’est Casterman qui a tenté l’aventure de proposer Le Voyage d’Henry au public francophone et ce, dans deux éditions successives. Et rien.
Pourtant, on est ici devant une curiosité. Car l’auteur a relevé la gageure d’expliquer en quelques pages à un public très jeune la notion de «vitesse généralisée» popularisée dans les années 1970 par Ivan Illich et Jean-Pierre Dupuy. Rien que ça. Rappelons, pour ceux et celles qui ont ignoré Énergie et équité (une série d’articles parus dans Le Monde en 1973, désormais disponible dans le premier tome des Œuvres complètes chez Fayard), ce qu’est la vitesse généralisée. La vitesse d’un véhicule se calcule selon la distance qu’il parcourt en un temps donné. Les embouteillages font déjà considérablement baisser cette vitesse. Mais Jean-Pierre Dupuy pousse le vice jusqu’à ajouter le temps passé à recueillir l’argent nécessaire à l’achat et à l’entretien de la voiture, le temps passé à l’amener au garage, à la laver, etc. Dans les années 1970 cette vitesse généralisée était de 7km/h, aujourd’hui elle est de 6km/h.
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Yancuic le valeureux | album de Fabrice NICOLINO (texte) & Florent SILLORAY (ill.)
Éd. Sarbacane, 2e trimestre 2007
66 pages - 15,90 €
Fabrice Nicolino, dont on connaît les ouvrages les plus récents sur les pesticides ou les agro-carburants (1), investit le domaine de la fiction pour faire passer ses préoccupations écologistes. Son héros, Yancuic, est un jeune garçon qui vit dans la forêt amazonienne au moment où les premiers hommes blancs pénètrent le continent sud-américain. L’histoire ne se joue pas autour de cette rencontre, mais autour d’un défi, dont l’enjeu est Sarilou, un petit singe dont Yancuic a su gagner l’amitié. Le défi perdu, Sarilou devient la propriété d’un autre enfant, cruel et violent, qui le laisse mourir, jusqu’à ce que…
Le récit des malheurs du petit singe est touchant, et peut nous engager à nous demander si nous éprouvons de l’empathie pour l’animal, ou pour l’enfant qui l’aime; quels devoirs nous avons envers les animaux. L’interrogation de notre rapport à la nature est subtile, étroitement mêlée à la fiction et jamais prise en charge explicitement par l’auteur. Plutôt qu’à un formatage des futurs éco-citoyens, ce genre d’ouvrage participe à la formation culturelle et sensible d’une génération ouverte sur les questions d’écologie.
(première publication de l'article: 20 octobre 2008)
(1) Pesticides: Révélations sur un scandale français, avec François Veillerette, éd. Fayard, 2007; La Faim, la bagnole, le blé et nous: une dénonciation des biocarburants, éd. Fayard, 2007.
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Yancuic le valeureux | album de Fabrice NICOLINO (texte) & Florent SILLORAY (ill.)
Yancuic, petit indien d’Amazonie, vient d’avoir dix ans, l’âge d’apprendre à pêcher le «poisson des trous». Il est orphelin: c’est son grand-père qui va l’initier, avec sagesse et une grande tendresse qui n’exclut pas une certaine dureté… Les enfants indiens doivent apprendre par eux-mêmes à survivre dans une nature splendide mais hostile. L’enjeu de cette expérience est dramatique pour Yancuic: s’il réussit il sera enfin considéré comme un grand, mais s’il échoue il perdra aussi son ami Sarilou, le petit singe apprivoisé qui est comme un frère pour lui. Car il a eu la bêtise de faire un pari avec Patzcu, un garçon brutal et jaloux: s’il ne capture pas un poisson des trous dès son premier jour de pêche, il devra donner son singe à Patzcu! Yancuic est courageux et intelligent, il connaît les dangers et les secrets de la rivière: quoique chétif et un peu rêveur, il peut gagner. Mais au cours de la pêche, un poisson-serpent le mord et l’empoisonne… Patzcu s’empare alors du singe. Yancuic, entre la vie et la mort, souffre de sa blessure, et encore plus de voir Sarilou maltraité par son nouveau maître. Pour sauver son ami singe, il tente un exploit: à peine guéri, il va pêcher tout seul à la Grande- Rivière. Et là, miracle, il aperçoit une troupe de dieux magnifiques, armés et casqués d’argent, peau blanche et cheveux jaunes…
L’aventure est prenante, imprégnée des antiques contes et croyances de ce monde indien encore isolé, préservé des certitudes de l’homme blanc. Les images peignent un éden verdoyant, plein de fraîcheur et d’une grande beauté. L’histoire a une issue heureuse pour le petit indien, mais le lecteur d’aujourd’hui contemple avec mélancolie ce monde qui avance, sans le savoir, vers une fin toute proche.
Mireille Penaud
(première publication de l'article: juillet 2007)
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18/07/2009
Yin la jalouse | album de Shen QIFENG, illustrations BOBI + BOBI
Éd. HongFei, coll. Caractères chinois, avril 2009 - 16€
Yin et Pan vivent un amour sans limite, ou plutôt dont la seule limite est l’immense jalousie de Yin. Quand Pan, malade, vient à mourir, Yin sombre dans la mélancolie. Son cousin, le peintre Huisheng, entend parler de la maladie de Yin et décide de la guérir. Il peint un beau jeune homme, qui ressemble étrangement à Pan, entouré de six jeunes femmes splendides et de magnifiques fleurs comme celle du jardin de Yin et Pan. Huisheng présente ses peintures à Yin en lui expliquant que Pan les avait beaucoup appréciées mais qu’il lui avait demandé de les conserver craignant que Yin ne les trouve pas à son goût. À la vue des peintures Yin entre dans une rage folle attisée par les explications de Huisheng sur le caractère «ordinaire» de Pan, et elle détruit toutes les fleurs de la maison. Mais ce faisant elle a quitté son lit et repris pied dans la vie.
Traduction et adaptation d’un texte chinois du XVIIIe siècle «Une peinture astucieuse fait office de bon médecin», comme nous l’expliquent judicieusement les éditeurs, Yin la jalouse s’inspire des traditions de la médecine chinoise qui considère qu’un remède est efficace s’il tient compte de la nature particulière du patient. Ici, pour guérir la belle et lui permettre de survivre à la disparition de celui qu’elle aimait, le «médecin», utilise sa jalousie pour ternir son amour et par là affaiblir la souffrance provoquée par la mort de Pan. L’idée est audacieuse et l’histoire de Yin un peu acide. Les images – des peintures où dominent des teintes de bleu – sont quant à elles d’une étrange beauté qui confère à l’album un caractère énigmatique.
Ariane Tapinos (juin 2009)
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19/06/2009
Hortense au plafond | album d'Aurore CALLIAS
Éd. Albin Michel jeunesse | 1° semestre 2009 | 13,50€
Prenez une petite fille au sommeil agité (Hortense, c'est elle), une chauve-souris joueuse (enfin… un tout jeune mâle prénommé Saguzar), ajoutez une loutre, des crêpes, un aïeul papivore, beaucoup de bleus, un peu de vert, de jaune et une touche d'orange, le tout dans une maison très haute et très tarabiscotée, agrémentée de nombreuses poutres et tuyauteries. Retournez le tout plusieurs fois et vous aurez un album qui invite - au moins! - à deux lectures pour ne pas s'endormir.
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Tsunami | album leporello de Joydeb et Moyna CHITRAKAR
Éd. Rackham, coll. Sous le Signe noir | 1° trimestre 2009 | 30€
Texte français du professeur A de l'Ink Institute FRMK d'après la traduction anglaise du chant original bengali Mala Chakraborthy et Sirish Rao.
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16/06/2009
Petit Mops | album d'ELZBIETA
Éd. du Rouergue | mai 2009 | 19,50€
À mi-chemin entre l'ours et la taupe, Petit Mops est un personnage attachant que le lecteur pourra suivre au travers des aventures rassemblées dans ce volume. Quatre histoire toutes simples, en noir et blanc et sans paroles, qui évoquent avec poésie et humour la nature, le passage du temps et des saisons qui déconcertent parfois notre petit Mops! Baluchon à l'épaule, on le retrouve successivement sur une plage, près d'un arbre ou d'une rivière, car Petit Mops est un grand voyageur qui va de rencontre en rencontre, vers la ligne d'horizon toujours représentée dans le dessin très épuré d'Elzbieta, dont ce furent, en 1972, les premières histoires publiées et jusqu'à présent inédites en France.
Nathalie Ventax (juin 2009)
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