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18/04/2009

À fond la caisse avec Steve Mac Kouïn | album de Taï-Marc LE THANH, illustré par MERLIN

9782020993074.jpgÉd. Seuil jeunesse | avril 2009 | 18 €

Steve Mac Kouïn aime ce qui va vite et il court du matin au soir. Un jour que son père est sorti, il décide de lui emprunter sa belle auto. Equipé de petites cales pour que ses pieds puissent toucher les pédales, le voilà parti pour une folle course. Bousculant tout sur son passage, il traverse ville et campagne, bientôt suivi par le shérif et sa sirène hurlante, un essaim de moustiques furieux (ses congénères ont été pulvérisés par la voiture de Steve), des animaux échappés d’un cirque ambulant…

Traversant le désert, Steve Mac Kouïn ne s’arrête que pour prendre à bord de son bolide deux ravissantes auto-stoppeuses qui mâchent du chewing-gum à la myrtille et avec qui, plus loin, il fera une pause baignade impromptue. Mais ses poursuivants n’ont pas abandonné la chasse et Steve Mac Kouïn, que seule intéresse la vitesse, accélère dangereusement et disparaît dans un bruit de tonnerre… À son retour, son père trouve Steve échevelé, occupé dans sa chambre avec ses petites voitures. Un parfum de myrtille flottant dans le garage l’intrigue…

Ce superbe album dont l’histoire, scandée par la phrase «mais Steve Mac Kouïn s’en moquait. Lui, ce qui l’intéressait, c’était la vitesse», ravira bien des enfants amoureux d’engins roulants et vrombissants, mais c’est avant tout un hommage à l’acteur Steve McQueen, à travers sa passion pour les courses automobiles. Taï-Marc Le Thanh et Merlin nous entraînent dans une délirante traversée de l’Amérique des années 60 : grands espaces, hippies, baignades nues… Les images sont splendides et évocatrices, comme cette double page où se déploient trois officiers de police, la tête surmontée de leur large couvre-chef, et qui prennent la pause devant leurs voitures. Le ciel bleu-gris est bas, le décor un désert de terre rouge, la ligne de fuite un hommage appuyé au cinéma des grands espaces américains. Et jusqu’au petit Steve Mac Kouïn de cette histoire, qui a les mêmes yeux bleus et les mêmes cheveux blonds que son illustre presque homonyme.

Ariane Tapinos (avril 2009)

Très Vieux Monsieur | album d'Adeline YZAC, illustré par Éva OFFREDO

tres vieux Mr.gifÉd. Rouergue, coll. Varia | mars 2009 | 14 €

Un Très Vieux Monsieur prend sa retraite. Il voyage, s’engage, lit, séduit. Il vit sa vieillesse entouré de Très Vieille Dame et Toute Petite Fille. Mais un matin au réveil, il regarde Très Vieille Dame et lui dit «Bonjour Madame, vous faites quoi dans mon lit ?» Autour de lui, tout le monde s’inquiète. Très Vieux Monsieur a «la tête à l’envers», il ne sait plus lire, ne sait plus compter, ni comment manger. Sa tête, maintenant, il l’a même perdue. Et autour de lui, toujours autant d’inquiétude :
« - nous venons le voir très souvent, disent ses voisins.
- Nous l’entourons, disent ses amis.
- Nous lui consacrons beaucoup de temps, dit sa famille.»

Très Vieux Monsieur semble s’effacer, comme son visage ridé, de plus en plus clair sur l’image, pour ne plus laisser de lui qu’un souvenir. Sa tête ne répond plus, alors c’est «main dans la main» et «cœur contre cœur» que ceux qui l’aiment vivent, «au jour, le jour» et «pas à pas», avec celui qui fut mais n’est plus vraiment là.
La maladie d’Alzheimer est devenue un sujet à la mode dans l’édition jeunesse et on a vu fleurir les albums sur les vieilles personnes un peu loufoques et tristes, mais ce livre-là est différent parce que, loin des démonstrations appuyées, il dit pourtant avec justesse les craintes, les peurs, les difficultés de celui qui est malade et de ceux qui l’entourent. Il dit ce temps de l’âge où le toucher reprend ses droits, où le cœur remplace la tête. Cette terrible maladie oblige à se séparer de ceux qu’on aime alors qu’ils sont encore là, comme des fantômes d’eux-mêmes. Alors si le livre de d’Adeline Yzac et Éva Offredo est un brin nostalgique, il n’est pas vraiment triste, juste fataliste. Texte et image disent le temps qui a passé, l’esprit qui s’est envolé mais le corps et le souvenir qui restent à aimer. Le texte tout en dialogues met ce vieil homme au centre des préoccupations de ceux qui l’aiment. Les images, très, très belles, de ces visages parcheminés, donnent à voir une vieillesse qu’on cache souvent aux enfants.
Un album magnifique, vraiment.

Ariane Tapinos (avril 2009)

10/04/2009

Mon premier livre de contes et de comptines | album de Franciszka THEMERSON

9782352890423.jpgTraduit de l’anglais par Françoise Morvan
Éd. MéMo, coll. Les Trois Ourses | janvier 2009 – 28 €

Ce très bel album regroupe quatre contes (Qui a tué Robin Rouge-Gorge ?, Le Bonhomme de pain d’épice, Les Trois Petits Cochons et Les Trois Ours) illustrés par Franciszka Themerson, une dessinatrice d’origine polonaise émigrée en Angleterre dans les années 40. À la fois audacieuses et délicieusement rétro, ses illustrations sont pleines de vie, tendres et impertinentes, jouant sur les contrastes de couleurs (un orange très vif, très lumineux voisine avec un bleu gris profond) et de formes (de grands aplats unis complétés par des détails au pinceau fin, légers, rapides). Le loup des Trois Petits cochons, en gilet rose à fleurs blanches, chapeau melon et col cassé amidonné, harcelant un petit cochon dodu à souhait dont le linge sèche nonchalamment sur un bord de page, est tout à fait savoureux. Les textes – dans l’excellente traduction de Françoise Morvan – sont à l’avenant : ce sont des versions non édulcorées (Boucle d’or y est certes jolie mais surtout très mal élevée !), jouant sur l’accumulation (la course effrénée du Bonhomme de pain d’épice), la poésie énigmatique (Qui a tué rouge-gorge), les répétitions et allitérations (le loup, encore : « Il souffla à bouffées, il souffla à bouffées, il souffla et souffla à bouffées et bouffées : jamais il ne put souffler la maison »).

Également éditrice, avec son mari écrivain Stefan, Franciszka Themerson avait fondé à Londres Gaberbocchus Press, une maison indépendante qui avait pour idéal de publier des best-lookers, des livres d’artistes plutôt que des best-sellers. Rien d’étonnant à ce que MéMo, qui excelle à faire revivre les plus belles créations en ce domaine, nous donne aujourd’hui à apprécier une part de son travail à destination des enfants. Ce Premier livre de contes et de comptines offre un plaisir à ne pas bouder, mélange de classissisme, de fantaisie et d’avant garde… indémodable, qui devrait ravir les petits et leurs parents pour sa première publication en français, soixante ans après sa création en Angleterre.

Corinne Chiaradia (mars 2009)

Histoire d'un loup | album de Loren CAPELLI, illustré par Juliette LAMARCA

9782844207371FS.gifÉd. Thierry MAGNIER | mars 2009 – 14 €

Un album en noir et blanc dont les linogravures accentuent l’intemporalité du conte.
La composition de l’ouvrage est finement étudiée : des illustrations sur double-page créent de véritables pauses dans le récit, offrant des espaces à l’imaginaire des lecteurs.

La forêt prend la parole pour conter l’histoire tout à fait singulière d’un loup qui veut se faire aimer d’une princesse…

Un livre qui s’inscrit dans l’histoire universelle, toujours réinventée, des relations entre l’homme et le loup, où se côtoient attirance, violence et mort.
La dualité homme-animal est traduite dans les linogravures par un traitement graphique différent : rondeur pour les personnages, accumulation d’angles et de traits brisés pour le loup.

Un album de très grande qualité.

Josuan (avril 2009)

La Nuit du visiteur | album de Benoît JACQUES

nuit visiteur.gifÉd. Benoît Jacques Books | (oct 2008) 1er trimestre 2009 – 17 €
Prix Baobab de l’album 2008

Un album au format original qui invite à entrer par la fenêtre de la jaquette pour plonger dans un monde étrange, où alternent paysages nocturnes, ombres qui se découpent sous la lune et intérieurs en noir et rouge.
La construction humoristique à partir du Petit Chaperon Rouge assortie de nombreux clins d’œil à des œuvres littéraires et cinématographiques offre différents niveaux de lecture.
Malgré une apparente simplicité, des jeux de sonorités, des allitérations, une typographie qui joue avec le texte font la richesse et l’intérêt de cette histoire.

Un petit bonheur de lecture et de relectures !

Josuan (avril 2009)

Pour les curieux une visite du très beau site de l'auteur :
http://www.benoitjacques.com/

06/04/2009

Brooklyn Baby | album de Marylin SINGER, illustré par Carll CNEUT

brooklyn baby.jpgTraduit de l’anglais par les éditions La Joie de lire
Éd. La Joie de lire | nov. 2008 - 15 €

Un bébé dort dans une poussette. Mais comment fait-il ce bébé pour dormir au milieu des bruits de la ville ? 10 klaxons tonitruant, 9 portables «agaçant», 8 chiens aboyant… et aussi des poubelles qui s’entrechoquent, des taxis dont les portes claquent, des basketteurs qui font rebondir leur ballon, des bus, des motos et… «soudain 1 oiseau qui commence à chanter… et voilà bébé qui se réveille !»

Ce superbe album à compter, ou à décompter, est une réjouissante immersion dans la ville, ses bruits nombreux et variés. Ses couleurs aussi, ici à dominante de tons orangés comme les briques des brownstones de New York et de Brooklyn surtout. C’est aussi un livre-jeu dans les pages duquel on peut retrouver, au milieu de l’enchevêtrement des objets et des gens, 8 chiens, 9 téléphones, 4 basketteurs…
C’est Carll Cneut dans son mode de plus souriant qui réalise ces très belles images de la ville trépidante et accueillante. La couverture est particulièrement réussie : une vue de New York stylisée et dominée par la silhouette du Chrysler Building qui brille, vêtu de gris, au milieu des couleurs de la ville.

Ariane Tapinos (avril 2009)

Lalita | album de Jocelyne SAUVARD, illustré par Anne-Laure WITSCHGER

9782732039299.jpgÉd. Le Sorbier | février 2009 - 13,50 €

Aujourd’hui est un grand jour : c’est la rentrée des classes, mais pour Lalita c’est surtout le jour où elle va avoir un petit frère ! Enfin un garçon dans cette famille de trois filles… C’est grand-mère qui va être contente, elle qui fait la tête depuis la naissance de Lalita, la cadette de la famille. Et puis papa aussi, qui pourra jouer au foot avec le petit Raja, qui sera un «fameux gardien de but» c’est sûr. Alors cette première journée d’école a le goût de l’attente et du secret, vite éventé. Ce n’est pas rien l’arrivée d’un garçon dans une famille indienne…

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05/04/2009

Champion | album de Gilles RAPAPORT

champion.jpgÉd. Circonflexe | octobre 2005 | 13 €

Voici l'histoire de Young Perez, qui conquit à vingt ans le titre de champion du monde de boxe, catégorie poids mouche, à Paris en 1931. Venu de Tunis, alors protectorat français, pour poursuivre sa carrière de boxeur professionnel en France, il livra 133 combats, en gagna 92 et en perdit 26. Le 21 septembre 1943, il est arrêté comme juif et emprisonné à Drancy, d'où il part le 7 octobre 1943 dans le convoi n°60 en direction d'Auschwitz. Il est abattu le 22 janvier 1945, pendant la Marche de la mort.

Champion nous raconte un bref, mais pourtant interminable moment, au cœur de ces quinze mois de détention de Young Perez, celui d'un combat sur la grande place de Buna à Auschwitz le 31 octobre 1943. Un étrange et abominable combat contre un «géant nazi… un tueur de squelettes». Un combat pour l'unique plaisir pervers de ses geôliers. Un duel qui, comme la vie au camp, ne répond plus à aucune des règles qui régissent la vie entre les hommes. Une lutte à mort entre un détenu juif poids mouche et son bourreau nazi poids lourd. Un combat, enfin, où tous les coups sont permis et encouragés. Alors qu'il se bat pour sa vie, Young repense à son existence d'avant, au soleil de Tunis, à l'amour et à la peur de sa mère. À cette vie de gloire qui, croyait-il, le protégerait de la haine. Alors qu'il se bat pour sa dignité, Gilles Rapaport s'adresse à lui et aux spectateurs impuissants de cet ignoble corps à corps, au-delà des années, des souffrances et des morts: «Frappe, Young! Frappe! Frappe! Frappe pour Michel, gazé à 2 ans! Frappe pour Adèle, assassinée à 90 ans! Je t'en supplie, Young, frappe-le encore. Que tes poings vengent les morts! Que ces coups effacent leurs souffrances!» Cette supplique, plus que tout le reste, atteint le cœur du lecteur et heurte sa conscience. Elle lui rappelle la réalité humaine de la Shoah: les enfants et les vieillards assassinés, mais aussi la violence qui appelle la violence. Ces mots sont dérangeants dans un «livre pour enfants», mais pourtant comment faire autrement? Comment, et pourquoi surtout, leur cacher que parfois la souffrance appelle la vengeance, au moins son expression dans les mots, vaine consolation. Cette question est au cœur de cet extraordinaire album, qui en cela va plus loin encore que le très beau Grand-père du même auteur. Cette question, c'est celle de la frontière entre la violence «légitime» – celle du combat de boxe lorsqu'il obéit aux règles de l'art, à la loi des hommes – et la violence effarante, perverse et gratuite qui ne répond plus qu'au plaisir de ceux qui l'exercent. Violences qui sont toutes deux le fait d'êtres appartenant à la même espèce humaine.

Il y aurait tant à dire sur ce livre : ses couleurs de nuit sans fin éclaboussées de neige, les traits de pinceaux épais qui deviennent tâches quand les coups explosent, la scansion et la beauté du texte… qu'en rendre compte en quelques lignes est déjà une trahison. C'est donc, comme tous les autres dont Comptines vous propose la lecture, mais plus encore que tous les autres : un livre à lire absolument.

par Ariane Tapinos (11 février 2006)

PS : À lire également, du même auteur : Grand-père (éd. Circonflexe, juillet 2005, 13€) et sur le destin d'un autre boxeur déporté, le très beau et très dur roman de Jean-Jacques Grieff, Le Ring de la mort (éd. L'École des Loisirs, coll. Médium, mars 2003, 207 pages - 7,30€)

04/04/2009

Oskar le coq | album de May ANGELI

9782844207258FS.gifÉd. Thierry Magnier | mars 2009 - 15,50 €

Cette histoire, toute en images, racontée par une artiste, nous conduit à découvrir la vie dans un poulailler.
Un album soigné, véritable petit livre d’art, qui permet de découvrir, page après page, des images réalisées à la gravure sur bois, en trois tons : noir, rouge et jaune.

Oskar, le roi du poulailler, déploie en vain tous ses charmes devant ses poulettes. Une action d’éclat lui permet de reprendre provisoirement un peu d’autorité…
L’absence de texte et la richesse de chaque planche, bordée d’une frise, invitent à un regard attentif et suscitent les échangent entre adultes et enfants.

Un bel album, original et plein d’humour.

Josuan (avril 2009)

Les Ailes d'Anna | album d'Anne CORTEY, illustré par Anaïs MASSINI

ailes d'anna.gifÉd. Autrement jeunesse | mars 2009 – 16,50 €

Un album qui évoque avec sensibilité et pudeur une difficulté de la vie quotidienne d’un enfant : une dispute entre ses parents.

Cet ouvrage permet d’aborder une situation, réelle ou fantasmée, qui peut angoisser les enfants.
Le texte clair, la typographie scripte facilitent la lecture intime des jeunes lecteurs.
On regrettera toutefois le choix de couleurs trop pâles de certaines pages qui nuisent à la lecture du texte.
Les illustrations pleine page, la fluidité des mouvements, les métaphores, traduisent le voyage d’Anna qui « fait battre ses ailes imaginaires ».

Un album à lire tout seul ou à partager.

Josuan (avril 2009)