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18/05/2009

Le Chat Botté | conte de Charles PERRAULT, illustré par ALBERTINE

chat botté.gifÉd. La Joie de lire | mars 2009 | 13,50 €

À sa mort un vieux meunier ne possédait qu’un moulin, un âne et un chat, que ses trois fils se partagent. Le plus jeune hérite du chat. Qu’en faire ? Il renonce à le manger quand l’animal se met à parler et lui promet la richesse, en échange d’une paire de bottes et d’un sac. Fièrement botté, le chat a plus d’un tour dans son sac… Usant de flatterie et de ruse, l'animal s’invente un maître – le marquis de Carabas – auquel il prête des serviteurs et des propriétés : champs, château… Fin psychologue, le chat convainc le Roi de la grandeur de son maître, se débarrasse d’un ogre vaniteux et transforme le pauvre fils du meunier en séduisant marquis propre à épouser une princesse.

Ce classique des contes de Perrault est reproduit dans sa version originale et très élégamment illustré par Albertine. L’artiste n’a pas modernisé artificiellement le vieux conte, mais a mis à profit son style très personnel pour en souligner l’intemporalité. Ses images vivement colorées, où le vert et le rouge dominent, présentent une alliance de délicatesse (finesse du trait, détails précieux) et d’incongruité (corps très étirés, disproportionnés, décors décalés : la serviette fleurie du roi, la robe à faux-cul de la princesse…) qui fait toute la saveur de son travail et illustre très bien le réalisme-fantastique propre au conte. Le traitement récurrent de deux motifs déclinés à chaque page en est un bon exemple : le décor floral – herbes folles, fleurs et céréales perchées sur de très très longues tiges – semble tout droit sorti de l’imagination d’un peintre qui aurait longuement observé la nature pour mieux la distancer ; la forme oblongue du moulin surmontée d’une cocasse petite pique se retrouve elle dans le bonnet du meunier, sur les pâtisseries, la vaisselle, le carrosse ou même la poitrine de la princesse ! C’est charmant (au sens envoûtant, comme un filtre de fantaisie), drôle et tout à fait en accord avec l’imaginaire du conte.

Corinne Chiaradia (avril 2009)

07/05/2009

Les arbres pleurent aussi | album d'Irène COHEN-JANCA et Maurizio A. C. QUARELLO

arbres pleurent aussi.gifÉd. Rouergue et Fondation pour la mémoire de la Shoah | mars 2009 | 14 €

Un vieux marronnier rapporte les événements dramatiques qui se sont déroulés sous ses branches, au 263 Canal de l’Empereur à Amsterdam, dès juillet 1942.
Ce bouleversant témoignage, écrit sur un mode poétique, s’accorde parfaitement avec les images délicates aux tons bistres, sépias puis bruns, évoquant les croquis et photos anciennes qui nous restent de cette époque.
La typographie change au fil du récit pour évoquer les interdits faits aux juifs ou pour mettre en valeur les citations du journal d’Anne Frank.
Nous admirons la grande subtilité d’écriture qui mêle harmonieusement le récit actuel du marronnier et le récit passé du journal d’Anne.
Le texte d’une très grande sobriété, économe de mots mais riche de sens, évoque les atrocités de la guerre en laissant des perspectives d’espoir offertes par le renouveau de la nature.

Un regard original et profond, très poignant, qui sans nul doute saura sensibiliser les jeunes générations au devoir de mémoire.

Josuan (8 avril 2009)

Petit Sapin bleu | album de Danièle SIEGLER et Mayana ITOÏZ

petit sapin bleu.jpgÉd. Les P’tits Bérets | octobre 2008 | 13 €

Le thème de la différence au pays des arbres.
«Tu n’es qu’une horrible tache bleue sur un somptueux fond vert.»
Petit Sapin Bleu est très malheureux dans la forêt des Grands Élégants Verts. Mais un jour, un peintre s’intéresse à lui…

Une histoire simple, joliment écrite et illustrée, qui porte un message d’espoir à la portée de jeunes enfants.

Josuan (8 avril 2009)

Ce type est un vautour | album de SARA et Bruno HEITZ

ce type est vautour.gifÉd. Casterman, coll. Les Albums Casterman | février 2009 | 13,95 €

Cet album nous a dérangées à la première lecture par la force des images et le réalisme du texte, parfois cru. Le sujet douloureux et délicat de la recherche affective d’une mère qui élève seule sa petite fille évolue peu à peu vers une situation violente.
Des relectures nous permettent d’apprécier le texte et les images qui nous plongent dans un quotidien tellement fréquent que l’on oublie d’y réfléchir; c’est le grand mérite de cet album.
Le choix du chien comme narrateur permet une vision distanciée mais objective de la situation. Il est à la fois témoin et acteur puisqu’il remplit son rôle de gardien et protège la famille. Il assiste au déchirement de la femme, «Elle», tiraillée entre son rôle de mère et son désir de femme pour «le type» à l’harmonica.
Le récit, organisé en différentes scènes, ponctuées tour à tour par deux phrases – «Ce type est un vautour», «Ce bar est un enfer» – qui participent à la montée en puissance de l’action, trouve un apaisement final.
Les gravures, très colorées, cernées de noir vibrent à l’unisson du texte et présentent le décor du point de vue du chien.

Nous avons apprécié la qualité éditoriale de cet album qui mérite d’être partagé.
Il nous semble plutôt destiné à de jeunes adolescents

Josuan (8 avril 2009)

01/05/2009

L'Océan noir | album de William WILSON

Couverture Océan Noir gif.gifÉd. Gallimard jeunesse, coll. Giboulées | avril 2009 | 15,90 €

Ni fiction, ni documentaire, ni album, ni roman, L’Océan noir est un livre hybride, métis comme son auteur franco-togolais, l’artiste William Wilson.
Autour de 18 «tentures appliquées»*, réalisées dans un atelier d’Abomey au Bénin, William Wilson mêle son histoire personnelle à celle qui lie depuis des siècles les Noirs aux Blancs. De l’arrivée des Blancs sur le continent africain aux guerres d’indépendances, des esclaves aux immigrés d’aujourd’hui, des anonymes aux personnages célèbres, L’Océan noir retrace l’histoire d’un métissage souvent violent mais porteur d’espoir, d’un «faisceau entrecroisé de relations (qui) a donné naissance à des merveilles et à des catastrophes» et qui «décrit ce que nous sommes et deviendra ce que nous en ferons».

Chacune des tentures est le point de départ d’un récit où se croisent l’intime, l’historique, le documentaire érudit et le témoignage. Chaque texte déploie, dans une langue parfaite, un moment de cette double rencontre entre l’auteur et sa propre histoire, entre les Noirs et les Blancs. L’ensemble forme un ouvrage passionnant et unique qui puise sa cohérence, au-delà de sa forme multiple (et même en miroir de cette forme) et de son sujet immense, dans la démarche quasi analytique de son auteur. «L’Océan noir est ma contribution aux mémoire éclatées du monde noir» écrit William Wilson. C’est aussi un livre qui rend compte du caractère fractionné (comme les tentures faites de plusieurs morceaux de tissus d’origines différentes) de l’histoire individuelle : «une étoffe mal taillée, malmenée et rapiécée de partout (…) à l’image du destin de chacun d’entre nous dans sa tentative de devenir un être humain, digne de ce nom».

C’est peu dire que L’Océan noir est un livre qui, bien qu’édité par Gallimard Jeunesse, s’adresse aux adultes comme aux adolescents. Il éblouira les uns comme les autres et tous y trouveront matière à réflexion, loin des clichés et des simplifications, dans une approche profonde et généreuse de cette histoire séculaire des Africains.

Ariane Tapinos (avril 2009)

* Ces tentures, ou toiles, sont fabriquées à partir de tissus appliqués (cousus) sur un autre.

30/04/2009

Oiseaux penchés et chiens tordus | album de Jens BONNKE

oiseaux penchés.jpgExpressions toutes bêtes
Traduit et adapté de l’allemand par Violette KUBLER et Christian BRUEL
Éd. Être | mars 2009 | 18,50 €

Sur le principe connu de l’illustration au pied de la lettre d’expressions populaires imagées, ce recueil-album est très abouti. Son petit plus : la «lettre» d’origine est allemande, les expressions sont toutes animalières.

Chaque expression est donnée d’abord dans sa traduction littérale et illustrée («un oiseau penché»), accompagnée de son explication («désigne un individu pas très clair, un peu louche»), puis de son équivalente française («un drôle de zèbre») et, si l’on retourne le livre, on trouve la version originale allemande (Ein schräger Vogel – So bezeichnet man einen zwielichtigen Kerl). Cela paraît un peu lourd expliqué ainsi, mais le principe est simple, lisible et fonctionne très bien. On apprécie d’autant plus l’initiative de Christian Bruel de traduire et adapter le travail de Jens Bonnke que la langue allemande est devenue un parent pauvre du système scolaire français; en conséquence (?) les albums bilingues français/allemand sont aussi rares que… les ours dans les Pyrénées.

Histoire de tordre le cou à quelques idées reçues, on remarquera que la sagesse populaire a souvent recours aux mêmes images de chaque côté du Rhin : «un éléphant dans un magasin de porcelaine», «les rats quittent le navire», «quand le chat est sorti les souris dansent»… s’emploient à Hambourg comme à Bordeaux. Bien sûr, certaines images sont légèrement décalées: quand l’Allemand «pleure avec les loups», le Français «hurle» avec les mêmes; là où nous avons «un chat dans la gorge», nos voisins ont «une grenouille» au même endroit; de même notre «chair de poule» devient «une peau d’oie» dans le froid germanique. Une dernière, pour les enfants qui fuient la salle de bains: ils font comme le chat français à sa «toilette» ou l’allemand à sa «lessive» (sommaire, dans les deux cas).
Enfin, on pendra plaisir à découvrir des expressions totalement incongrues dans notre langue : «ficeler un ours sur quelqu’un», «donner du sucre au singe» ou encore «l’oiseau penché» et le «chien tordu» du titre… À vous de jouer et de découvrir ce que ces animaux nous disent, en vous jetant sur l’album!

Corinne Chiaradia (avril 2009)

27/04/2009

Une reine trop belle | album de Christine LAMIRAUD

reine trop belle.jpgÉd. Talents Hauts, coll. Des livres pour les filles ET pour les garçons | avril 2009 | 11,50 €

Dans un palais vivait une reine si belle que ceux qui l’apercevaient ne pouvaient plus la quitter des yeux. Le roi son époux, rongé par la jalousie, décida de l’enfermer dans la plus haute tour pour la soustraire aux regards de ses sujets. La reine malheureuse un soir en vint à pleurer. Une rainette la vit et décida d’exaucer son vœu : être laide pour retrouver sa liberté. Au matin, elle se réveilla transformée et put dès lors discrètement se mêler à la vie du palais. Son mari affligé découvrit sa métamorphose, pourtant la rainette l’obligea à exposer de nouveau sa reine aux regards des habitants du royaume. Passée la surprise, tous reconnurent en elle cette charmante femme si pleine d’esprit, d’intelligence et de gentillesse, qui se mêlait chaque jour à la vie de la cour. Le roi comprit sa bêtise et il en resta ainsi.

Sous la forme d’un conte classique, une histoire qui l’est beaucoup moins, sur le regard qu’on porte à la beauté et qui parfois rend aveugle aux autres qualités et sur la jalousie comme appropriation de l’autre. Christine Lamiraud a eu l’excellente idée de ne pas clore son histoire sur une pirouette qui, en rendant à la reine sa beauté, aurait atténué son propos. Ici la reine reste laide mais aimée et respectée, par son roi comme par ses sujets, pour ce qu’elle est : une femme intelligente et généreuse.

Ariane Tapinos (avril 2009)

20/04/2009

Rufus | album de Tomi UNGERER

rufus.gifTraduit de l’anglais (États-Unis) par Florence SEYVOS.
É
d. L’École des loisirs | mars 2009 - 13 €
(édition originale New York 1961)

Nous avons remarqué cet album tant pour ses qualités éditoriales que pour le plaisir de retrouver un  auteur de référence de la littérature de jeunesse : Tomi Ungerer.

Rufus, petite chauve-souris mâle, découvre les couleurs grâce au cinéma et décide de délaisser l’univers sombre de la nuit pour celui, coloré et lumineux, du jour.
Images et texte se marient très harmonieusement pour donner son charme au récit et toute sa force au message. L’aventure de Rufus le conduit à la découverte du monde et, finalement, de lui-même.
Le contraste des deux univers traduit par des couleurs complémentaires, le mouvement ou l’immobilité, la sobriété, la justesse du trait – dessiné et écrit – invitent le jeune lecteur à découvrir le texte pour suivre l’aventure de Rufus.

Un grand coup de cœur pour cet album qui aidera les enfants à grandir.

Josuan (avril 2009)

Le Bel Uniforme gris | album de Jérôme LE DORZE, illustré par Alessandra FUSI

bel uniforme gris.gifÉd. Anna Chanel, coll. De toi à moi | février 2009 – 13,50 €

Le thème de la guerre est poétiquement traité dans ce récit en randonnée.

Petit Bonhomme va généreusement offrir, à chaque étape de son parcours, une pièce de son uniforme de guerrier et recevoir, en échange, petit à petit, des éléments pour une tenue très « pacifique ».

Ce très bel album prône des valeurs humanistes universelles : amour, générosité, partage, altérité…
Nous avons beaucoup aimé le jeu dynamique entre le texte et les illustrations, la qualité de l’écriture, la symphonie des couleurs rassurantes qui portent ensemble un message de paix.
Souhaitons aux enfants, tous « Petits Bonshommes », de pouvoir vivre heureux, dans ce monde sans guerre !

Josuan (avril 2009)

La Croûte | album de Charlotte MOUNDLIC, illustré par Olivier TALLEC

croute.gifÉd. Flammarion, coll. Les albums du Père Castor | mars 2009 – 10 €

La croûte ? Mais de quelle croûte s’agit-il ? Petit bobo ou grande blessure ? Un jeune garçon raconte sa peine juste après la mort de sa maman. Comment combler le vide de l’absence et faire face au quotidien ? Comment s’occuper de papa et ne pas oublier maman ? Et que faire aussi pour mamie ? Heureusement mamie saura trouver les mots qui soignent et redonnent le goût de vivre.

Le choix affirmé du rouge dominant la typographie et les illustrations évoquent le thème traité et la force de la vie. Un grand coup de chapeau à l’auteur pour la justesse du texte et à l’illustrateur pour la finesse expressive des personnages ; ils nous font partager ensemble, tour à tour, émotion et espoir. Une grande réussite.
Un sujet sensible qui, selon nous, nécessite un accompagnement pour les plus jeunes lecteurs.

Josuan (avril 2009)