18/04/2009
Très Vieux Monsieur | album d'Adeline YZAC, illustré par Éva OFFREDO
Éd. Rouergue, coll. Varia | mars 2009 | 14 €
Un Très Vieux Monsieur prend sa retraite. Il voyage, s’engage, lit, séduit. Il vit sa vieillesse entouré de Très Vieille Dame et Toute Petite Fille. Mais un matin au réveil, il regarde Très Vieille Dame et lui dit «Bonjour Madame, vous faites quoi dans mon lit ?» Autour de lui, tout le monde s’inquiète. Très Vieux Monsieur a «la tête à l’envers», il ne sait plus lire, ne sait plus compter, ni comment manger. Sa tête, maintenant, il l’a même perdue. Et autour de lui, toujours autant d’inquiétude :
« - nous venons le voir très souvent, disent ses voisins.
- Nous l’entourons, disent ses amis.
- Nous lui consacrons beaucoup de temps, dit sa famille.»
Très Vieux Monsieur semble s’effacer, comme son visage ridé, de plus en plus clair sur l’image, pour ne plus laisser de lui qu’un souvenir. Sa tête ne répond plus, alors c’est «main dans la main» et «cœur contre cœur» que ceux qui l’aiment vivent, «au jour, le jour» et «pas à pas», avec celui qui fut mais n’est plus vraiment là.
La maladie d’Alzheimer est devenue un sujet à la mode dans l’édition jeunesse et on a vu fleurir les albums sur les vieilles personnes un peu loufoques et tristes, mais ce livre-là est différent parce que, loin des démonstrations appuyées, il dit pourtant avec justesse les craintes, les peurs, les difficultés de celui qui est malade et de ceux qui l’entourent. Il dit ce temps de l’âge où le toucher reprend ses droits, où le cœur remplace la tête. Cette terrible maladie oblige à se séparer de ceux qu’on aime alors qu’ils sont encore là, comme des fantômes d’eux-mêmes. Alors si le livre de d’Adeline Yzac et Éva Offredo est un brin nostalgique, il n’est pas vraiment triste, juste fataliste. Texte et image disent le temps qui a passé, l’esprit qui s’est envolé mais le corps et le souvenir qui restent à aimer. Le texte tout en dialogues met ce vieil homme au centre des préoccupations de ceux qui l’aiment. Les images, très, très belles, de ces visages parcheminés, donnent à voir une vieillesse qu’on cache souvent aux enfants.
Un album magnifique, vraiment.
Ariane Tapinos (avril 2009)
Retour page précédente | Page d'accueil | Publié dans critiques Albums | Lien permanent | Commentaires (0) | |
Les commentaires sont fermés.