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31/05/2009

Enfants d'ici, parents d'ailleurs | documentaire de Carole SATURNO

enfants d'ici parents.gifHistoire et mémoire de l'exode rural et de l'immigration
Illustrations Olivier Balez, Fabienne Burckel, Bertrand Dubois et Renaud Perrin
Éd. Gallimard Jeunesse, coll. Par quatre chemins | novembre 2005 | 144 pages, Index, bibliographie - 22,90€

[PRIX SORCIERES documentaires 2007]

L'objet de ce splendide et très original documentaire est tout entier contenu dans son titre: il nous raconte, nous explique, la vie et l'histoire familiale de ces enfants de France dont les parents ou arrières grands-parents sont venus d'ailleurs. Un ailleurs proche quand il s'agit de l'exode des campagnes françaises vers les grandes villes du pays, ou beaucoup plus lointain situé aux portes de l'Europe ou de l'autre côtés des océans. À l'heure où les discours sur l'immigration mêlent à l'envie vérités et contre-vérités, réalités et fantasmes, cet ouvrage est indispensable pour replacer l'immigration dans l'Histoire.

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Shalom salam maintenant | roman de Rachel CORENBLIT

shalonm salam.gifÉd. du Rouergue, coll. DoAdo monde | avril 2007 |178 pages - 9€

En France, aujourd'hui: deux jeunes filles se rencontrent dans un hôpital où elles assistent chacune aux derniers instants d'un proche. Pour arriver à cette rencontre si facile - deux adolescentes fuyant les adultes et la mort dans les couloirs d'un hôpital toulousain - et pourtant totalement improbable, il faut remonter le temps et quatre histoires: celles de David, Léah, Oumaïma et Yashin.
Quatre histoires qui passent par le maquis du Vercors, Jérusalem à la veille de la partition de la Palestine et la Cisjordanie. Quatre personnages, quatre histoires qui retracent l'histoire de la naissance de l'État d'Israël et du départ des palestiniens chassés de leurs terres. Naissance d'un immense espoir pour les juifs, ceux de Palestine, ceux poussés hors d'Europe par la folie nazie; naissance d'une haine nourrie de la pauvreté et de la dureté de l'exil, pour les réfugiés palestiniens, réfugiés sur leur propre terre, réfugiés parqués dans des camps aux frontières d'un État qui n'est plus le leur. De ces quatre histoires entremêlées naîtront Camille, la Française, un peu juive, un peu goy et Chaïma, la palestinienne française de coeur et d'espoir. De cette rencontre naît l'émotion et l'espoir d'une paix, enfin. Shalom salam maintenant…
Une écriture heurtée, parfois brutale et dans un langage cru, des récits entrecroisés dans l'espace et le temps. Une vraie maîtrise littéraire qui ne nuit pas à l'émotion du récit, bien au contraire.

Ariane Tapinos
(première publication de l'article: 13 juin 2007)

Mon papa roulait les R | album de Françoise LEGENDRE (texte) & Judith GUEYFIER (ill.)

mon papa roulait.gifÉd. Sarbacane - Amnesty international | 2° semestre 2008 | 14,90€

Un très bel album. Que l'on aurait tort de classer vite - beaucoup trop vite! - dans la case «album à thème» - ici: l'expatriation ou «ça fait quoi d'être un enfant d'immigré?» Or, aucune charge démonstrative dans ce petit bijou. Un album tout en retenue et en pudeurs et une vraie déclaration d'amour au père. Sans nier les difficultés liées à l'émigration, les auteures maintiennent la douleur à distance, comme circonscrite dans le non-dit ou dans le rythme même de la lecture, à l'image de la phrase magnifique qui ouvre (et clôt) l'album:
«Mon papa roulait les R… mais je ne m'en rendais pas compte.»

Le livre égrène des souvenirs, couleurs, odeurs, jeux, un peu de ce qui fait la saveur de l'enfance et se rattache ici à un père différent («Mon papa m'appelait de drôles de noms qui voulaient dire Petite ourse ou Cornichon… mais je ne le savais pas») Que l'on me comprenne: il ne s'agit pas de naïveté (comme c'est génial d'avoir un père étranger) mais de cette qualité particulière faite à la fois d'innocence («je ne m'en rendais pas compte») et de curiosité, d'attrait du secret (les enveloppes avec un avion bleu et les «j'étais fière qu'il ait traversé toute l'Europe»). Même sans les comprendre, l'enfant devine toujours les difficultés des adultes, les déchirures et les rejets (les larmes du père existent dans le livre aussi), mais le récit est au passé et nous parle d'une femme qui s'est construite sur ce terrain-là, doux-amer, que l'album transcrit de si belle manière. À l'image de la dernière double-page montrant une belle jeune femme, allongée sur un lit multicolore, entourée de petits objets (une peluche, une matriochka) et dont la jupe dessine un horizon où deux petites silhouettes - une enfant guidant un homme - se tiennent par la main.

La nationalité d'origine du père n'est pas précisée, on prononce le mot «apatride» et l'on imagine les confins de l'Europe (la jeune femme a des traits asiatiques - tsiganes? Mongols? - des yeux en amande et une somptueuse chevelure brune)… et ce n'est pas grave. La puissance d'évocation n'en est que plus soutenue: en dehors des livres de géographie, ce pays du père est un mythe pour l'enfant, tout entier contenu dans son accent… Les auteures nous disent en quelque sorte: on peut grandir avec ça, ces mystères-là, ces étrangetés, et les aimer encore.

Corinne Chiaradia
(première publication de l'article: 28 novembre 2008)

Le Voyage de grand-père | album d'Allen SAY

voyage grand-pere.jpgÉd. L'École des loisirs | septembre 1995 | 11,90 €

Dans ce très bel album, Allen Say nous conte l'histoire de sa famille entre Japon et États-Unis. Son grand-père parti du Japon pour découvrir le monde, installé en Californie, marié au Japon. Sa mère partie, à l'âge adulte, vivre avec ses parents au pays natal. La guerre qui empêcha son grand-père de retourner aux États-Unis. Lui, enfin, qui s'en alla voir la Californie de ses propres yeux. Ce Voyage de grand-père est celui de l'amour pour deux pays différents et parfois même ennemis. C'est un voyage fait d'allers et retours et d'hésitations, d'émerveillements et de regrets. Illustré par de pleines pages qui sont, chacune, comme un tableau - portrait ou paysage - cet album est un peu comme un album photo qu'Allen Say nous invite à feuilleter avec lui. C'est l'album de sa famille, de son histoire tissée entre deux pays, deux univers, deux cultures. Hommage à ce grand-père mort sans avoir pu retrouver sa Californie, Le Voyage de grand-père est aussi une déclaration d'amour à deux pays si chers au cœur de l'auteur qui avoue: «le plus drôle c'est que dès que je suis dans un pays, je m'ennuie de l'autre».

Ariane Tapinos
(première publication de l'article : 5 juillet 2005)

PS : Ce livre a reçu la Caldecott Medal aux États-Unis en 1994, et le Prix Chronos décerné par la Fondation Nationale de Gérontologie en 1996. Mais ce magnifique album est aujourd'hui (mai 2009) épuisé en France. On peut toujours espérer une réédition…

Sam story | roman de Laura JAFFÉ

sam story.gifÉd. du Rouergue, coll. DoAdo | février 2005 | 168 pages - 9€

«Mais non je n'invente pas. Enfin, juste un peu. Essaie d'imaginer» Ainsi s'ouvre le roman de Laura Jaffé, qui va retracer la vie de Sam avec ce qu'il faut de réalisme bien tempéré d'imagination. Sam vient de mourir. À Paris, sa fille et sa petite-fille de quinze ans vident son appartement. La dame de l'agence se fait attendre… Dans le froid (le chauffage est déjà coupé), au milieu de ces quelques mètres carrés qui furent son intimité, les deux femmes tâtonnent pour dénouer les fils d'une filiation hésitante… Le livre est la trace de ce dialogue, mais nous n'entendons que les mots de la mère, les réponses de l'adolescente sont seulement suggérées. On la devine incrédule devant la quête nostalgique de sa mère.

Le roman, d'inspiration autobiographique, est donc le récit mi-réel mi-rêvé de la vie de Sam, fils d'immigrés juifs ashkénazes, depuis son arrivée tout bébé à Ellis Island («l'île des larmes») en 1920, puis sa vie aux États-Unis, à Paris, à Toulouse, un parcours d'éternel voyageur, d'intellectuel anticonformiste, et de «père… inadéquat» (de l'aveu même de la narratrice). Le texte n'est pas dénué d'humour («J'abuse tu trouves? Tu crois que je te fais le coup de Yddish Cosette chez l'Oncle Sam?»), le dialogue est vivant, on se prend au jeu d'imaginer les réponses de la fille. Cette mère qui s'en défend finit par nous toucher dans sa recherche du père. Sa quête est à la fois extraordinaire (par les origines de Sam, son parcours, son refus du trivial) et terriblement commune: quel enfant peut affirmer vraiment connaître ses parents?

Publié précédemment dans la collection «La brune» des éditions du Rouergue, Sam Story est réédité en doAdo et c'est une belle initiative. Doucement, presque paradoxalement, le récit se fait plus universel à mesure que l'histoire est plus précise. «Connaître ses origines, d'où viennent ses grands-parents, ses arrières grands-parents, est-ce vraiment important?»: si l'on doute de la réponse à apporter à cette question inscrite en 4e de couverture, on dispose au moins, en refermant le livre, de quelques pistes sensibles, à suivre pour se construire.

Corinne Chiaradia
(première publication de l'article : 1er mars 2005)

Manolis de Vourla | roman d'Allain GLYKOS

manolis vourla.gifÉd. Quiquandquoi | sept. 2005 | 144 pages - 19,50€
Livre accompagné d'un DVD documentaire

Vourla, bourgade grecque d'Asie Mineure, septembre 1922. Manolis a sept ans. En quelques jours sa paisible vie de petit paysan va être emportée dans la tourmente de l'Histoire. La France et l'Angleterre viennent d'abandonner leur ancienne alliée, la Grèce, et renoncent à la soutenir dans son incroyable tentative de reconquête d'une partie de la Turquie. La défaite grecque provoque la «Grande catastrophe d'Asie Mineure»: les Grecs sont chassés de ce territoire turc dans lequel ils vivent depuis toujours (les Turcs qui habitent le nord de la Grèce depuis presque aussi longtemps, sont eux aussi renvoyés dans leur «patrie»).
Manolis est depuis quelques jours chez sa grand-mère, Sophia, lorsque la guerre frappe à sa porte. Sophia et lui doivent partir. Marcher des heures de long de routes jonchées de cadavres. Embarquer sur un navire militaire anglais, puis sur un vieux cargo grec. Ils arrivent enfin à Nauplie, la première capitale de la Grèce libre, où ils sont conduits avec tous les réfugiés dans une école de la ville.

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Soudain dans la forêt profonde | album d’Amos OZ (texte) & Georg HALLENSLEBEN (ill.)

soudain dans foret.gifTraduit de l’hébreu par Sylvie Cohen
Éd. Gallimard jeunesse | mars 2008 | 94 pp. - 14,50 €

Il était un village où les animaux n’existaient plus. Il était un village où les souvenirs des parents étaient remplis d’animaux. Il était un village où les parent voulaient oublier ce temps révolu. Certains pourtant parlent – l’institutrice Emanuela affiche des dessins d’animaux dans la classe ou imite leurs cris – mais il sont considérés comme fous. Nimi, un petit garçon rejeté par ses camarades à cause de son physique, ose raconter ses rêves remplis d’animaux. Un jour il quitte l’école et part dans la forêt, tout le village se lance à sa recherche en vain. Ce n’est qu’au bout de trois semaines qu’il réapparaîtra, mais à la place de mots ce sont des hennissements qui sortent de sa bouche. Davantage rejeté il va devenir, au yeux des villageois et de sa propre famille, un pauvre petit garçon errant et fou.
Tous ces mystères environnant le village ont attisé la curiosité de deux autres enfants, Matti et Maya, qui veulent comprendre et connaître la vérité. Ils ont en plus un secret qui n’appartient qu’à eux et qui les conforte dans leur idée: aller explorer la forêt. Sachant leurs parents effrayés par cette dernière et par leurs propres souvenirs, ils décident de partir sans en parler à personne…

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29/05/2009

Aagun | album de DEDIEU

aagun.gifÉd. Seuil Jeunesse | mars 2009 - 15€

Quel bel album de sagesse et d'apprentissage à recommander à tous!

Les Hounks surgissant comme des barbares dévastent et pillent régulièrement le campement de leurs voisins. Le seigneur envoie son fidèle lieutenant, Aagun, pour leur venir en aide. Mais cette aide ne sera pas celle qui est attendue...

Ouvrage très original tant dans le fond que dans la forme. On est plongé d'emblée dans ce récit initiatique qui prend toute sa valeur universelle car il n'est pas situé dans le temps et se déroule dans de grands espaces peu définis. Le procédé d'écriture final crée une véritable rupture dans le récit avec un immense effet de surprise qui délivre le message fondateur de cet ouvrage. Les images, faites de grands coups de pinceau noirs, sur fond blanc et de silhouettes de personnages miniatures, accompagnent avec dynamisme et énergie l'épopée de la tribu. Chaque double page est ponctuée d'un sceau rouge, qui évoque les cachets asiatiques à la cire, et d'une lettrine du même rouge portant un étendard. Nous avons beaucoup aimé le jeu entre le blanc, le noir, le vide, le plein, l'utilisation magistrale de l'espace qui donne plus de force au récit.
La dédicace à Fabienne Verdier permet aussi de situer cet album dans une perspective artistique, philosophique et humaine engagée qui nous a profondément touchées.

Josuan (mai 2009)

J'aime ma maman | album de Karine QUESADA, illustré par Marie-Pierre EMORINE

j'aime ma maman.gifÉd. Scarabea | février 2009 - 13,90€

«Un livre simplement pour dire je t'aime».
Dès que l'on prend cet album en main des sensations de douceur, de tendresse, de moëlleux, s'imposent au lecteur.
Le plaisir se confirme au fil des double-pages: couleurs lumineuses et harmonieuses, papier pelliculé, chatoyant, bien adapté à des petites mains, graphisme raffiné, «cousu main», qui évoque des broderies.
Le texte, très musical, poétique, nous accompagne au fil d'une balade intime auprès des mamans du monde et de leurs enfants.

Un livre doudou pour tous les petits et un livre tendresse pour leurs mamans.
Quelle belle idée de cadeau pour une naissance ou pour tout autre occasion!

Josuan (mai 2009)

PS: Les avis sont partagés sur cet album, voir le «coup de gueule» de Terf, qui nous a été signalé par Thierry Lenain

26/05/2009

Comme mon père me l’a appris | album de RASCAL

comme mon pere.gifÉd. L’École des loisirs, coll. Pastel | mars 2009 | 11,50€

Un enfant inuit suit en tous points les enseignements de son père. Il raconte sa journée de chasse au phoque, depuis un rêve annonciateur jusqu’à sa conclusion sur la glace. À chaque étape, l’enfant s’applique à tout faire «comme son père lui a appris»: se lever tôt, partager son déjeuner, choisir ses armes avec soin, atteler les chiens, hâter la course de la meute, trouver le trou de respiration, préparer ligne et harpon, enfin patienter… Mais à l’instant fatal, quand le phoque pointe son museau, le jeune inuit ne peut pas le tuer. Un échec, une trahison du père? Non, car cet homme très sage a aussi appris à son fils que «nous sommes tantôt faibles, tantôt forts».

Il se dégage de l’album, de ses phrases simples, courtes, répétitives et de ses illustrations au style primitif (peinture sur bois où dominent des nuances de blancs venteux traversés de quelques couleurs) un sentiment de sérénité qui le rend vraiment précieux. La confiance mutuelle père/fils dont il témoigne, jusque dans l’acceptation de l’échec et des faiblesses, est magnifique. Du grand Rascal.

Corinne Chiaradia (avril 2009)