Rechercher : tu me prends en photo
Comme mon père me l’a appris | album de RASCAL
Éd. L’École des loisirs, coll. Pastel | mars 2009 | 11,50€
Un enfant inuit suit en tous points les enseignements de son père. Il raconte sa journée de chasse au phoque, depuis un rêve annonciateur jusqu’à sa conclusion sur la glace. À chaque étape, l’enfant s’applique à tout faire «comme son père lui a appris»: se lever tôt, partager son déjeuner, choisir ses armes avec soin, atteler les chiens, hâter la course de la meute, trouver le trou de respiration, préparer ligne et harpon, enfin patienter… Mais à l’instant fatal, quand le phoque pointe son museau, le jeune inuit ne peut pas le tuer. Un échec, une trahison du père? Non, car cet homme très sage a aussi appris à son fils que «nous sommes tantôt faibles, tantôt forts».
Il se dégage de l’album, de ses phrases simples, courtes, répétitives et de ses illustrations au style primitif (peinture sur bois où dominent des nuances de blancs venteux traversés de quelques couleurs) un sentiment de sérénité qui le rend vraiment précieux. La confiance mutuelle père/fils dont il témoigne, jusque dans l’acceptation de l’échec et des faiblesses, est magnifique. Du grand Rascal.
Corinne Chiaradia (avril 2009)
26/05/2009 | Lien permanent
Exposition de photos du 29 septembre au 15 octobre : Bordeaux vu par Thomas Cornon
29/09/2009 | Lien permanent
PABLO TROUVE UN TRÉSOR
album
de Andrée POULIN & Isabelle MALENFANT (illustrations)
Éd. Les 400 coups, coll. Carré blanc, 2e trimestre 2014 – 13€
Chaque jour, Pablo et sa grande sœur Sofia, escaladent la montagne de déchets qui se trouve non loin du bidonville dans lequel ils habitent. Les pieds dans les ordures, ils bravent la saleté du lieu et la méchanceté de ceux qui se comportent en maitres des ordures et rançonnent les enfants. De leur récolte dépend la survie de leur famille. Un trésor – aussi modeste soit-il – a le pouvoir d’améliorer l’ordinaire et de faire rêver les enfants.
Au milieu des images grises de la décharges et du bidonville, Pablo, Sofia, et le chien qui les accompagne, sont les seules tâches de couleur, avec ici et là, dans le monceau d’immondices, quelques reflets colorés qui sont autant de promesses et peut-être même des trésors. Leurs rêves de poulet, de bonbons au miel, de glace… aussi sont colorés mais leur univers reste saturé de gris.
Rares sont les albums sur la pauvreté et celui-ci est, à ce titre, remarquable. Parce qu’il peut se lire comme l’histoire d’une aventure pleine de dangers, il peut permettre d’aborder utilement ce sujet avec des enfants qui seront surement surpris de découvrir que pour Pablo et Sofia un livre est un trésor…
Ariane Tapinos (mars 2015)
A lire, dans la même collection : Tu me prends en photo, de Marie-France Hébert et Jean-Luc Trudel (2011)
18/03/2015 | Lien permanent
MAI 68 RACONTÉ AUX ENFANTS
Philippe GODARD
Éd. De La Martinière jeunesse, coll. Raconté aux enfants, mars 2018- 14,50€
On ne présente plus Philippe Godard, excellent auteur de documentaires qui ne brille jamais autant que sur les sujets qui lui tiennent à cœur et il y a fort à parier que ce Mai 68 raconté aux enfants en fait partie ! Et on ne s’étonnera pas de la large place que l’auteur fait aux mouvements dans les usines et plus généralement, sur le front des ouvriers et des travailleurs.
Comme dans les autres ouvrages sur Mai 68, celui-ci évoque tant le contexte international que national qui a vu naitre cette effervescence révolutionnaire et imaginative et propose également une chronologie (1958 - 1969) centrée sur les années qui ont précédées et donc menées à ce joli mois de mai. Il a cependant une particularité, liée à la collection dans laquelle il s’inscrit : il est très illustrés de nombreuses affiches et photos d’actualités. Or si Mai 68 reste dans nos mémoires pour ses slogans inventifs, poétiques et surréalistes, il est aussi, avec la guerre du Viet Nam, l’un des premiers moments d’histoire où l’image prend une telle importance.
Que l’on pense aux affiches lithographiées de l’Atelier populaire des Beaux-Arts mais aussi aux photos iconiques des barricades dans les rues du quartier latin, des usines à l’arrêt et des faces à faces entre manifestants et forces de l’ordre. Le choix de la photo de couverture est à ce titre très intéressante : des CRS plutôt souriants devant un monceau de pavés !
Un livre qui peut permettre d’échanger et de partager entre générations, sur ces événements mais aussi sur les évolutions vécues par les grands-parents et les parents et l’héritage de Mai 68.
Ariane Tapinos (avril 2018)
23/04/2018 | Lien permanent
JE CONSOMME DONC JE SUIS ?
Documentaire
de Benoît HEILBRUNN
Illustré par Quentin VIJOUX
Éd. Nathan, coll. décodage
Septembre 2013 – 16,90 €
Consommer nous est devenu tellement naturel qu’au premier abord ce documentaire pourrait paraître incongru. Et pourtant ! L'automatisme de la consommation est bien une habitude culturelle acquise et largement entretenue par ceux qui ont un intérêt économique à nous transformer en homo consommicus. Et pour ce faire, tous les moyens sont bons : odeurs artificielles, musiques d’ambiance, messages flatteurs… Tout ce qui est susceptible de faire sortir le consommateur qui se cache en chacun de nous est mis en œuvre par les marques pour nous convaincre du caractère indispensable à notre bonheur (et à notre statut social) de leurs produits.
Ce documentaire foisonnant et passionnant prend tout le recul nécessaire pour décrypter ces stratégies. Il porte un regard critique acéré sur le monde qui nous entoure et met en lumière tout ce qui peut faire débat dans nos pratiques de consommateurs. Le tout dans une forme moderne et soignée qui mêle photos et illustrations.
Voilà le genre de documentaire qui donne envieaux adultes de se servir au rayon jeunesse !
Ariane Tapinos (octobre 2013)
14/11/2013 | Lien permanent
SAFARI NUIT | documentaire de Stéphanie Baunet & Claude Grétillat
Éd. Le Baron perché
octobre 2011 - 16 €
Que font les animaux la nuit, quand je dors? Quel enfant ne s’est pas posé cette question en luttant, parfois, contre le sommeil pour tenter d’y répondre. Plusieurs artistes s’y sont essayés avec succès, comme Yvan Pommaux dans Une nuit, un chat… et John Burningham avec C’est un secret! Mais toujours sur le mode de la fantaisie et de l’imaginaire. Ici ce safari nocturne, s’il prend la forme d’un très bel album, est aussi très documenté. Il révèle aux enfants des villes que, lorsqu’ils dorment à poings fermés, de nombreux animaux s’activent, sous terre, dans les airs, chassent, se prélassent…
Ces animaux existent vraiment et leurs activités nocturnes sont avérées. D’ailleurs, Safari nuit a bénéficié de l’aide du Musée zoologique de Strasbourg et les gravures anciennes des différentes bestioles, qui sont insérées dans des photos urbaines traitées en bichromie, viennent toutes des planches des célèbres zoologistes Buffon et Schreiber.
Le choix de cette technique d’illustration à la fois très précise – gravures anciennes, photos – et ouverte sur le merveilleux – la bichromie évoque les lumières de la nuit mais aussi celles du rêve – fait de ce curieux documentaire un très bel album. Tandis que les informations apportées sur chacun des animaux, font de cet album un très beau et très utile, documentaire…
Ariane Tapinos (octobre 2011)
26/10/2011 | Lien permanent
QU’EST-CE QU’ON DIT ? / QU’EST-CE QU’ON FAIT ?
deux albums
de Sesyle JOSLIN & Maurice SENDAK (illustrations)
Traduit de l’américain par Françoise Morvan
Éd. MeMo, novembre 2017 - 14€
Que dire, que faire, dans des circonstances aussi habituelles et délicates que de rencontrer un cow-boy très énervé, de dîner (de spaghettis) chez la reine, de heurter un crocodile dans la rue, de devoir aller sauver une princesse par une pluie battante ou suivre le shérif de Nottingham alors qu’on est plongé dans un bon bouquin ?
Rester poli et serviable en toutes circonstances et ne pas oublier d’enfiler ses bottes avant d’aller secourir la princesse qui prend l’eau.
Voici deux albums indispensables à tous les enfants bien élevés et forts utiles aux autres.
Rien à voir avec ces horribles livres qui veulent, sérieusement, apprendre aux enfants à bien se tenir (et qui rivalisent dans l’horreur avec ceux qui leur enjoignent de sauver la planète… à notre place), ici tout n’est que fantaisie, humour et poésie.
Depuis un peu plus d’un an, les éditions MeMo ont entrepris la publication d’albums de Maurice Sendak (il est l’auteur et l’illustrateur de certains d’entre eux et « seulement » l’illustrateur des autres) encore inédits en France et c’est chaque fois un régal ! Ces deux derniers albums sont parmi les meilleurs (s’il est possible d’en distinguer tant il est vrai que Maurice Sendak est toujours génial). Leur intelligence et leur ironie dénuée de méchanceté en font de véritable petits manuels de savoir-vivre à l’attention des enfants mais aussi de leurs parents qui ont, parfois, oublié, et c’est regrettable, les vraies règles de la vie en société.
Comme toujours, MeMo apporte à ses livres un soin extraordinaire qui en fait des objets uniques et précieux. On se prend à rêver de revoir nos classiques préférés de Maurice Sendak, édité avec tant de délicatesse.
Ariane Tapinos (décembre 2017)
A lire sur notre blog, la critique de l'inégalé et inégalable Max et les Maximonstres de Maurice Sendak
29/12/2017 | Lien permanent
L’argent ça marche comment ? | documentaire d'Alvin HALLL
Traduit et adapté de l’anglais par Vanessa McQueen | éd. Nathan | février 2009 - 14,95 €
Question importante, et plus encore en temps de crise où l’argent vient à manquer… Pour y répondre, l’auteur, très emballé par son sujet, remonte aux sources de la monnaie, évoque la figure et les théories de quelques grands économistes, se penche sur la valeur de l’argent, le coût de la vie et plonge avec enthousiasme dans le monde de la finances et des affaires. Avec une multitudes d’illustrations, d’icônes, de photos et une masse considérable d’informations, ce documentaire ravira les enfants curieux mais agacera peut-être quelques adultes…
C’est que, porté par son sujet (et l'on sent bien qu’il l’aime son sujet) Alvin Hall fait preuve d’assez peu d’esprit critique à l’égard de la société de consommation et des excès de la mondialisation économique. Le peu de recul qu’il prend relève du minimum syndical : l’argent ne fait pas (toujours) le bonheur et le commerce c’est mieux quand c’est équitable. Pour le reste… Dans le chapitre sur l’économie, une double page, intitulée «Bon plan» explique au lecteur comment monter sa petite entreprise de confiture. La recette est simple : des ressources naturelles (des fruits, du sucre) + des ressources financières (des pots, des casseroles…) + des ressources humaine (des employés) et de l’esprit d’entreprise (la recette de Mamie). Et pour réussir, le truc infaillible : «ressources humaines : je vais convaincre ma famille de m’aider. Je ne paierai pas mes employés»… On appréciera !
Cela dit, et si le lecteur est capable de plus de distance critique que l’auteur, ce documentaire a le mérite d’aborder un sujet qui, bien plus que le sexe et la violence, reste tabou : c'est déjà pas si mal !
Ariane Tapinos (mars 2009)
08/04/2009 | Lien permanent
Simone Veil : «Non aux avortements clandestins» | documentaire de Maria POBLETE
Éd. Actes Sud Junior, coll. Ceux qui ont dit non | mars 2009 | 95 pp. - 7,80€
Pour écrire cette critique, j’ai voulu retrouver une image que j’avais en mémoire – mais que peut-être ma mémoire a fabriqué – de Simone Veil, la tête entre les mains, sur les bancs de l’Assemblée nationale ou du Sénat. J’ai tapé sur un moteur de recherches quatre mots clés : Simone, Veil, IVG, photos. Ce que j’y ai trouvé m’a donné envie, pour une fois, d’écrire cette critique à la première personne. D’écrire au delà du livre de Maria Poblete mais pour dire combien il est utile, pour assumer une opinion sur son sujet même.
Quand on entre ces quatre mots sur un moteur de recherche, on trouve des dizaines de pages où s’alignent des photos. Sur la plupart d’entre elles, on voit Simone Veil, magnifique dans la vieillesse comme dans la fleur de l’âge, à la tribune de l’Assemblée ou souriante, toute jeune sur la couverture de son autobiographie (Une vie parue aux éditions Stock en 2007). Mais au milieu de ces photos, sur chacune de ces pages, se sont glissés d’autres clichés sanguignolants de foetus (et non d’embryons), quand ce ne sont pas même des nouveaux nés ou des enfants. Et alors que la lecture du livre de Maria Poblete m’a remis en mémoire les insultes et les contrevérités auxquelles Simone Veil a du faire face lors des débats sur la loi sur l’autorisation de l’interruption volontaire de grossesse, en 1974, je constate que les mêmes insultes, les mêmes mensonges sont, en ce début du XXIe siècle, en libre accès sur internet.
Le paradoxe, c’est que ce fait démontre l’extrême importance de ce petit livre paru dans cette remarquable collection pour adolescents, «Ceux qui ont dit non». Parce qu’il est clair et qu’il dit l’histoire de cette conquête qui donne aux femmes le pouvoir sur leur corps, à travers un portrait en quelques touches de celle qui en fut l’étendard par obligation morale (au nom d’une morale sociale) plus que par conviction idéologique. Parce qu’il s’adresse réellement à un public de jeunes lecteurs – dont on espère bien que ce ne seront pas que des jeunes lectrices – par son niveau de langue et son approche. Et si le choix que fait son auteure, de démarrer son récit par celui de la déportation de Simone Veil désarçonne au premier abord, il prend tout son sens quand on lit les ignominies qui ont été dites à l’époque et qui sont véhiculées aujourd’hui encore. Pour comprendre la noirceur des propos calomnieux de certains opposants à l’IVG en 1974, comme aujourd’hui, il était indispensable de re-situer Simone Veil dans son histoire. Pour comprendre, peut-être, la ténacité et le courage de cette femme, il fallait partir de là où la fréquentation de l’inhumain détermine la droiture d’une vie et de ses engagements.
L’avortement est aujourd’hui un droit en France, mais un droit menacé par la violence de quelques-uns et l’ignorance d’un grand nombre. Espérons que ce livre contribuera à faire connaître leurs droits à ceux qui devront les défendre demain encore.
Ariane Tapinos (avril 2009)
25/04/2009 | Lien permanent
Bon anniversaire | documentaire d'Emma ADBÅGE
Traduit du suédois par Sylvain Briens
Éd. Notari (Genève), coll. L'oiseau sur le rhino | janv. 2010 - 16€
Qui n'a pas rêvé étant enfant que ce soit tous les jours son anniversaire? L'auteure de ce drôle de documentaire prend la question très au sérieux et interroge les mille et un cas d'anniversaires qui sont dans la nature. Son tour du monde commence par la Suède: sacrés Suédois qui le jour de leur anniversaire disent qu'ils «remplissent l'année»… et de quoi remplit-on une année? Et pourquoi les adultes ne semblent pas toujours aussi excités et heureux que les enfants en ce jour fatidique? Pourtant certaines grandes personnes sont fêtées avec pompe et trompette («Bon anniversaire au roi!» s'exclame une passante, tandis que son compagnon pense «Bahhh!»). Et si l'on songe au règne animal - les hamsters qui ne vivent que deux ans, les libellules quelques jours ou les tortues plus que centenaires, quid de leurs anniversaires respectifs? La Suède qui en plus d'un roi a aussi quelques vénérables humains centenaires, les honore d'un télégramme (du roi justement) et d'un passage à la télé, ce que ne font pas les parents pourtant bien tentés de marquer chaque mois, voir chaque semaine de leur petite merveille de bébé! Et si l'on fêtait son anniversaire tous les jours? Imaginez les montagnes de cadeaux, la taille du gâteau, le nombre de bougies!!… et la lassitude qui s'en suivrait.
L'album illustre sur le mode humoristique toutes les situations évoquées (un grand-père refuse de souffler ses quatre-mille-cent-soixante bougies, ce qui, à un anniversaire par semaine et 52 semaines par an, lui donne en gros 80 ans). Entre réalisme et loufoquerie, le documentaire pose sur un mode décalé assez efficace la question du découpage temporel et du relativisme: nos années d'hommes sont des minutes de mouches, l'exception n'est goûteuse et désirée que parce que la règle l'est beaucoup moins. Et si l'on remplissait une année de 365 fêtes d'anniversaire on négligerait d'en conserver le souvenir dans l'album photo de la famille! Un documentaire original, et plus profond qu'en apparence.
Corinne Chiaradia (février 2010)
13/03/2010 | Lien permanent