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15/05/2014

PIERRE CONTRE CISEAUX

Pierre contre ciseaux.gifroman
de Inés GARLAND
Traduit de l’argentin par Sophie Hofnung
Éd. L’école des loisirs, coll. Médium, mars 2014, 227 pages - 16€

Alma appartient à la bourgeoisie de Buenos Aires. Ses parents possèdent une maison de vacances dans une île du delta où ils passent chaque weekend. Là, ils ont pour voisins Dona Angela, deux de ses fils, Tordo et Chico et les trois enfants de sa fille : Marito, Carmen et Lucio. Malgré leur différence de condition sociale, Carmen est la meilleure amie d’Alma. La seule aussi de cette petite fille enjouée mais solitaire, fille unique et plus à l’aise avec ses petits voisins qu’avec les enfants de son école privée de la capitale. Carmen et Alma partagent leur jeux en faisant fi de leurs différences comme seuls les enfants peuvent le faire. Elles passent des heures les pieds dans l’eau ou accrochées aux arbres à se raconter des histoires. Depuis les pontons, elles observent les adultes, elles guettent le passage du « collectif » (le bateau collectif) ou du bateau épicerie. Un jour, cachés derrière la fenêtre  elles observent les ébats de Tordo avec la belle « hongroise » (qui est allemande !) qui possède l’une des maisons le long du fleuve. Chaque jour, elles veillent sur le petit Lucio. Parfois, elles partagent leurs jeux avec Marito.
Plongée dans l’enfance puis dans l’adolescence, Alma ne perçoit pas immédiatement les changements liés à l’instauration de la dictature militaire qui succède au coup d’état du 26 mars 1976.  De leur côté, révoltés par la violence des injustices sociales qui marquent l’Argentine au début des années quatre vingt, Carmen et Marito ne restent pas inactifs.


Mais leurs agissements, comme leur vie si différente de la sienne, échappent à Alma. Peu à peu, au travers des sentiments qui l’unissent à Marito, le monde d’Alma va pourtant s’ouvrir, dans la douleur, à la misère et la violence qui l’entourent.

Pierre contre ciseaux, qui fait référence au jeu bien connu mais peut être également à ce qui oppose les mondes d’Alma et de Carmen, d’Alma et de Marito, est un très beau roman d’apprentissage. Dans l’île, Alma jouit d’une liberté que tout oppose au carcan de son éducation et de son milieu social. Ses liens avec la famille de Carmen prennent racine sur ce bout de terre baigné par les eaux du fleuve. Son enfance insouciante est percutée par la réalité sociale et l’histoire violente de son pays. Inès Garland nous livre peu de détails sur cette histoire de son pays et c’est au travers de l’arrogance de la police du pouvoir militaire qu’Alma, comme le lecteur, voit s’installer la dictature. La fin du roman fait référence aux enfants disparus et une note de l’éditeur rappelle le rôle des Grand-mères de la place de Mai qui  continuent de lutter pour que leur soient rendus leurs petits enfants, les enfants des 30 000 disparus de la dictature.

A défaut d’en apprendre plus dans ce beau roman, il est une véritable invitation à se pencher sur l’histoire de l’Argentine et plus largement des dictatures militaires de l’Amérique latine au milieu du XXe siècle.

Ariane Tapinos (mai 2014)

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