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Jérôme par cœur | album de Thomas SCOTTO (texte) & Olivier TALLEC (ill.)

jérôme par coeur.gifÉd. Actes sud junior | nov. 2009 | 14€

C'est une histoire d'amour. C'est une histoire d'enfants. D'enfants qui s'aiment et «ne sont là pour personne» selon la jolie formule de Prévert, placée en exergue de l'album. C'est quoi l'amour quand on a sept ans (ou six ou huit)? On se tient toujours la main, «très accroché». On se choisit dans la file indienne qui visite le musée. On est toujours caché là, en sécurité «bien protégé dans les yeux» de l'être aimé. On partage les goûters, les histoires, la rigolade, les projets de vacances, les escalades de l'Himalaya. On rêve des rêves parfumés à l'odeur de l'autre, on fouille dans une malle à trésors pour lui faire des cadeaux. Et qu'importe que le «on» ce soit Jérôme et Raphaël, c'est le sentiment qui compte et c'est à lui que rendent un très bel hommage les deux auteurs de cet album tendre, pudique et chaleureux comme les échanges de sourires de ses deux héros.

Avec une infinie délicatesse Thomas Scotto au texte et Olivier Tallec pour les images cernent à petites touches l'affection immense de deux bambins l'un pour l'autre. Et quand Raphaël, après avoir tourné en vain dans sa chambre autour de son lit, de son bureau et de questions sans réponse, trouve finalement le cadeau qui convient à Jérôme, il dit simplement: «J'ai oublié papa et maman, j'ai pensé à Jérôme, par cœur. Et bien sûr que oui: Raphaël aime Jérôme, je le dis. Très facile». Le grand mérite des auteurs est d'avoir montré la complicité et à peine suggéré les tourments. Alors non, ce n'est pas du tout un album «sur» l'homosexualité (au sens où la plupart du temps on entend les thématiques en littérature jeunesse: parler de ce qui fait mal ou dérape ou pose problème). De sexualité il n'en est pas du tout question, évidemment. Mais d'amour oui, et beaucoup, et très fort. L'histoire et sa lecture sont à hauteur d'enfant, exactement. C'est un album au présent, qui ne conjecture rien sur l'avenir de ces garçons (qui sait si à douze ans Raphaël n'en pincera pas pour une jolie Clotilde?) mais se contente - et c'est énorme - de respecter leurs sentiments, ici et maintenant. On savait Olivier Tallec doué pour les couleurs de l'amour (on se souvient du magnifique Je vous aime tant, récit sur une vie d'un amour informulé, auquel la dernière illustration de Jérôme par cœur - les enfants traversant la rue en courant main dans la main - est comme un clin d'œil heureux: eux n'ont pas attendu des années pour traverser et se dire leur attachement). Sans ostentation, sans pathos, auteur et illustrateur ont su conjuguer leurs talents pour nous faire partager des bribes de bonheur, légères, profondes. Universelles.

Corinne Chiaradia (novembre 2009)

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Le Schmat doudou | album de Muriel BLOCH & Joëlle JOLIVET (illustrations)

Schmat doudou.jpg Éd. Syros, coll. Paroles de conteurs - Petites oreilles | sept. 2009 | 10,50€

À sa naissance Joseph reçu de son grand-père, tailleur de son état, une belle couverture cousue main pour couvrir son petit lit. En grandissant, l’enfant fît de la couverture son doudou qu’il traînait partout. Un schmat doudou, un doudou chiffon usé de toutes les tendresses de Joseph. Un jour sa mère en eut assez de cette couverture dégoûtante et la jeta. Joseph la récupéra et courut, de l’autre côté de la rue, chez son grand-père, qui aussitôt la transforma en une petite veste que Joseph porta jusqu’à ce qu’elle soit devenue vraiment trop petite. Alors sa mère s’en débarrassa de nouveau, et une fois encore, Joseph récupéra son schmat doudou et implora son grand-père d’en faire quelque chose qu’il pourrait garder. Le schmat doudou devint ainsi cravate, puis mouchoir et termina son existence de doudou en petit bouton de tissu pour fermer le pantalon de Joseph. Ce dernier le perdit, puis le retrouva, puis le perdit de nouveau… définitivement.

Ce conte yiddish, déjà paru dans le recueil Contes de Chelm (éditions Syros, épuisé) et illustré ici par Joëlle Jolivet, est délicieusement raconté par Muriel Bloch qui nous donne à entendre l’accent du shtetl et toute la tendresse qui lie Joseph à son grand-père. Joseph en grandissant se sépare peu à peu, et avec difficulté, de son doudou, véritable «couverture de sécurité», pour parler comme Charly Brown, des Peanuts. Et puis un jour, sans y prendre garde, Joseph n’a plus besoin de son doudou, qu’il soit couverture, mouchoir ou bouton. Il a grandi et son grand-mère n’est plus qu’un souvenir à ses côtés. Mais dans sa chambre, où il couche sur le papier l’histoire de son schmat doudou, les murs sont tapissés du même motif que celui de sa couverture fétiche…
Schmat doudou nous raconte ce long voyage vers l’âge adulte au cours duquel on se défait peu à peu de son enfance pour n’en garder que le souvenir. Au cœur de ce voyage, le conte rend toute son importance à un bout de tissu si cher aux plus petits.

Ariane Tapinos (novembre 2009)

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04/12/2009 | Lien permanent

Bih-Bih et le Bouffron-Gouffron | album de Claude PONTI

bih-bih.gifÉd. L'École des Loisirs | nov. 2009 | 44 pages – 28,50€

Bih-Bih et son ami champignon Filifraiïme marchent tranquillement pour aller prendre le thé, sans se rendre compte qu'un monstre terrible avale des planètes entières et qu’ils sont en train de se faire avaler par le Bouffron-Gouffron. Afin de sauver le monde, Bih-Bih devra retrouver la première goutte de la première pluie tombée sur terre. Elle commence alors un long voyage périlleux dans l’estomac du monstre où flottent des pans entiers de paysages et de constructions. Œuvres d’arts, monuments célèbres, le dernier album de Claude Ponti est un véritable musée où l’on retrouve les plus grands chefs-d’œuvres de l’humanité. Bih-Bih, telle Alice (les références sont nombreuses!) traverse les vestiges de notre monde que ce soit dans le ciel ou sous la mer, et elle fera bien des rencontres avant de parvenir à terrasser le monstre et à faire revenir la Terre à la vie.

Nathalie Ventax (janvier 2010)

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30/01/2010 | Lien permanent

UN NOËL D'ENFANT AU PAYS DE GALLES

Un Noël d'enfant au Pays de Galles.jpgroman poétique
de Dylan THOMAS, illustré par Peter BAILEY
Traduit de l'anglais par Lili Sztajn
Éd. Gallimard Jeunesse, (première édition française du texte : Denoël 2005) octobre 2015, 74 pages - 13,90€

« Il y a de cela des années et des années, quand j’étais un petit garçon, quand il y avait des loups au pays de Galles, quand les oiseaux de la couleur des jupons de flanelle rouge frôlaient d’une aile vive les collines aux courbes de harpe, quand nous chantions et nous prélassions toute la nuit et le jour dans des grottes qui sentaient le dimanche après-midi dans les salons humides des fermes, et que nous chassions, avec des mâchoires de diacres, les Anglais et les ours, avant l’automobile, avant la roue, avant le cheval à tête de duchesse, quand nous montions à cru les collines heureuses, il a neigé, neigé. »

Le poète Dylan Thomas égrène des souvenirs des Noël de son enfance au pays de Galles. Du temps où la neige recouvrait les collines, du temps ou les oncles « à forte carrures » et les « tantes menues » venaient partager le repas familial. Le lecteur comme l’enfant qui l’interroge sur ces Noëls d’antan, s’émerveillera de ce qui existait alors, magnifié et transformé par le souvenir du poète et sa langue musicale. Car même si la neige tombe encore en décembre au pays de Galles, elle ne monte plus « du sol en écharpes », elle ne pousse plus « en une nuit sur les toits des maisons comme une mousse pure et bisaïeule ».

La poésie transforme le quotidien et insuffle de la magie dans nos souvenirs. Si bien qu’il n’y a nulle nostalgie dans ce voyage au pays de l’enfance mais une invitation à la rêverie. Cette lecture – qu’il faut faire à haute voix pour entendre toute la subtilité et la malice de la prose poétique de Dylan Thomas – donnera à chacun l’envie de parfumer les maisons d’écorces d’orange, d’allumer le feu dans les cheminées, de prolonger la soirée de Noël. Elle donnera aux enfants l’idée d’écouter, en douce, les adultes et d’imaginer des hippopotames, ou toutes autres créatures incongrues, marquant de leurs pas lourds la neige fraiche. 

Ce livre, avec ses phrases sinueuses et parfois interminables, comme se déroulent les souvenirs dans nos mémoires,  et ses aquarelles délicatement humoristiques, est une petite merveille qui devrait trouver sa place aux pieds des sapins, aussi bien pour les grands que pour les petits. Ou, à l’idéal, dans la chaleur d’une lecture partagée.

Ariane Tapinos (novembre 2015)

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30/11/2015 | Lien permanent

COMMENT FABRIQUER SON GRAND FRERE/ un livre d'anatomie et de bricolage

corps,fratriealbum documentaire
de Anaïs VAUGELADE
Éd. L'École des Loisirs, novembre 2016 -19,80 €.

Zuza est de retour, et elle veut un grand frère. Pas un petit frère : ça c'est facile, tout le monde sait comment on fait. Non, Zuza veut un GRAND frère, et les grands frères, et bien, il faut les fabriquer... Heureusement, Zuza sait exactement comment faire, elle a tout ce qu'il lui faut pour bricoler le grand frère idéal et, en cas de doute, le crocodile se tient prêt, son encyclopédie crocodilis à la patte. La construction peut commencer : des os jusqu'au bout des ongles, Zuza, le crocodile et leurs jouets-assistants nous entraînent dans une découverte à la fois fantaisiste et rigoureusement exacte du corps humain .

 

Le dernier album d'Anaïs Vaugelade flirte avec le documentaire et fait découvrir aux jeunes lecteurs comment se compose le corps humain : Zuza, apprentie docteur Frankenstein fabrique son grand frère avec minutie et sérieux et chaque étape de la construction est l'occasion d'une nouvelle leçon.
Un album qui fourmille d'informations et d'humour pour enfin comprendre comment fonctionnent les grands frères... et tous les autres !

Nathalie Ventax (décembre 2016)

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31/12/2016 | Lien permanent

LE MÉLI MÉLO DES CADEAUX Une histoire de Noël par Taro Gomi

Meli melo.jpgalbum
de Taro GOMI
Traduit du japonais, éd. autrement, novembre 2014 – 12,50€

Ce Père Noël très moderne (même si l’album a été publié pour la première fois au Japon en 1983), arrive en hélicoptère pour procéder à la distribution des cadeaux. Par la fenêtre des maisons – un vide au format rectangulaire dans la page – il aperçoit ses habitants et cherche dans sa hotte le cadeau le plus indiqué. Seulement… ce qu’il voit peut être trompeur et peut-être est-il aussi un peu distrait. Les rayures ne sont pas celles du Zèbre mais les longs cous de trois autruches, les deux triangles bruns ne sont pas les oreilles de Monsieur Renard mais deux des écailles du crocodile…
Pas sûr que les autruches fassent bon usage de l’écharpe destinée au zèbre ou que le crocodile apprécie la casquette du renard ! Sans parler de l’ours qui n’aura rien (seul son ventre se voit depuis la fenêtre, c’est à dire un grand rectangle gris… autant dire personne) ou du petit garçon qui aura deux jouets parce qu’un second visage apparaît depuis sa fenêtre. Ce visage n’est pas celui de son jumeau mais d’un ballon accroché à côté de son lit !

Pourtant, chacun s’y retrouve à la fin : le garçon, généreux, donne son second jouet à l’ours malchanceux, les autruches arborent fièrement leur belle écharpe à rayures qui les (re)lie toutes les trois, la lapins transforment en couverture le grand pull que le Père Noël croyait déposer chez le crocodile…

Immensément connu au Japon où il signe toute sortes d’objets et même… de délicieuses pâtisseries colorées, Taro Gomi est surtout connu en France pour ses cahiers de gribouillages parus aux Seuil Jeunesse, dans ses grandes années. Et si plusieurs de ses albums sont traduits, cette initiative, d’éditer un livre de plus de trente ans, des éditions autrement jeunesse est excellente (de quoi regretter plus encore la disparition annoncée de cet éditeur…). On retrouve dans ce petit album tout ce qui fait le charme des œuvres de Taro Gomi : un dessin épuré aux couleurs très contrastées, un brin de malice et une lecture qui mêle histoire et jeux.

Ariane Tapinos (décembre 2014)

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01/12/2014 | Lien permanent

COLIN DE L'ESPACE. LA COURSE COSMIQUE PUANTE

Colin de l'espace.jpgroman {Première lecture}
de Tim COLLINS
Traduit de l’anglais par Mickey Gaboriaud et illustré par Joëlle DREIDEMY
Éd. Albin Michel Jeunesse, coll. Mes premiers Witty, premier semestre 2016, 125 pages - 8,50€

Colin s’ennuie au plus haut point dans sa classe où sévit le très barbant le Monsieur Watkins. L’arrivée d’un nouvel élève, Harry, va transformer ses longues journées d’école en une incroyable aventure. Il faut dire que Harry n’est pas n’importe quel nouveau… Il arrive de la galaxie du Centaure et voyage dans le temps dans une… poubelle ! De plus il est équipé d’un extraordinaire téléphone-portable-transpondeur-interstellaire… Avec l ‘un et l’autre, il peut voyager dans l’espace et dans le temps.

Après s’en être donné à cœur joie sur des planètes lointaines et dans un avenir rempli de nouveautés technologiques, Colin et Harry se rendent à l’aube des temps et là… l’aventure se complique… Une rencontre inopinée entre un poil de barbe de Monsieur Watkins et une petite créature verte située au tout début de l’évolution va entrainer un bouleversement inattendu et dramatique qui va modifier l’espèce humaine désormais affublée des traits du visage peu gracieux de Monsieur Watkins (moustaches comprises). Colin et Harry vont devoir se mettre en quatre pour corriger cette abominable erreur…

Ce petit roman très illustré est une hilarante première lecture qui ressemble à un vrai petit roman avec ses 125 pages. Paru en même temps que le très drôle Crumble (texte de Michael Rosen et images de Tony Ross : un chien fait passer un entretien à ses futures maîtresses…), ces deux livres inaugurent une nouvelle collection, mes premiers WItty, qui décline pour les plus jeunes et moins aguerris à la lecture, l’excellente collection Witty des éditions Albin Michel. Dans le même esprit très british que sa grande sœur, ces premiers Witty plus illustrés et d’un format plus petit, peuvent également se prêter à une lecture partagée. Après des années de vaches maigres, nous nous réjouissons que les éditeurs s’intéressent de nouveau à ces lecteurs passagers qui d’écouteurs d’histoires deviendront peut-être des dévoreurs de romans. 

Ariane Tapinos (mars 2016)

 

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21/03/2016 | Lien permanent

LES INCORRIGIBLES ENFANTS DE LA FAMILLE ASHTON T.1 UNE ETRANGE RENCONTRE

orphelin,loup,angleterre,aventureRoman
de Maryrose WOOD
Illustré par John KLASSEN, traduit de l'anglais par Noémie GRENIER
Éd. Flammarion, avril 2015, 308 pages -14€

Mademoiselle Penelope Lumley - quinze ans et fraîchement diplômée de l'Académie Swanburne pour jeunes filles pauvres mais intelligentes - est en route vers le domaine de la famille Ashton pour y passer son premier entretien d'embauche. Lord et Lady Ashton sont en effet à la recherche d'une gouvernante pour les enfants de la maison. L'annonce est alléchante : « Recherchons dès maintenant : Gouvernante énergique pour trois enfants pleins d'entrain. Connaissances en français, latin, histoire, savoir-vivre, dessin et musique requises. Expérience avec les animaux préférée » ; et la jeune Pénélope - qui a le physique de l'emploi - voue une passion au le monde animal depuis sa lecture des (très nombreuses) aventures d'Arc-en ciel le poney. C'est donc avec beaucoup d'inquiétudes mais une certaine confiance en elle (bâtie sur les solides préceptes et les innombrables maximes de la très honorable Agatha Swanburne) que Miss Penelope Lumley fait la connaissance de Lady Constance Ashton qui s'avère inexplicablement bien plus nerveuse qu'elle. 

Il semble vite en effet que la très jeune lady Constance soit plus soucieuse que la nouvelle gouvernante de ce que le poste soit rapidement pourvu et la prise de contact avec sa potentielle employeuse est perturbée par de mystérieux hurlements qui convainquent vite miss Lumley que son entretien d'embauche n'a rien de traditionnel ; impression d'ailleurs vite confirmée par la rapidité avec laquelle on lui confie le poste et fait signer un contrat.

 

Une fois installée (...et quelque peu désarçonnée par le fait qu'elle n'ait toujours pas rencontré les enfants dont elle aura la charge ), Penelope décide de visiter les écuries d'où s'échappent les cris désespérés entendus pendant sa conversation avec Lady Constance. C'est là qu'elle découvre les trois enfants de la famille Ashton.
Âgés d'environ dix à quatre ans, les trois futurs élèves de Miss Lumley glapissent, aboient, se roulent par terre et ont indubitablement été élevés par des loups. Consternée par leur état de crasse et d'abandon, la jeune gouvernante décide donc de prendre les choses en main et de s'occuper du bien être d'Alexandre, Beowulf et Cassiopée, comme les a étrangement prénommés Lord Ashton, qui les a « attrapés » lors d'une partie de chasse.

Roman inaugural d'une série de six (dont cinq sont déjà parus outre atlantique) ce premier volume des aventures des incorrigibles enfants de la famille Ashton est une roman plein de malice, une caricature bienveillante des Mary Poppins de la littérature enfantine anglaise qui laisse une large part au mystère et à l'aventure. La mystérieuse origine des « incorrigibles » n'est en effet pas révélée à la fin de ce premier tome, et les quelques pistes qui se dessinent ne manqueront pas d'allécher le lecteur … Courage la suite est prévue pour l'automne !  

Nathalie Ventax (juin 2015)

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25/06/2015 | Lien permanent

J’ai le vertige | roman de Jennifer ROY

Vertige.jpgTraduit de l’américain par Emmanuèle Sandron
Éd. Alice jeunesse | coll. Les Romans | nov. 2010
210 pp. - 12,90€

«En 1939, les Allemands ont envahi la ville de Lodz, en Pologne. Ils en ont clôturé une partie au moyen de fil de fer barbelé. Puis ils y ont confiné 270 000 Juifs. C’était ça, le ghetto de Lodz.
Les Alliés ont libéré le ghetto à la fin de la guerre, en 1945. Seuls 800 Juifs en sont sortis vivants. Parmi eux, il n’y avait que douze enfants.
J’étais l’un des douze
Sylvia Perlmutter, mars 2003 - Prologue à J’ai le vertige.

Syvia est une toute petite fille d’à peine cinq ans lorsqu’elle et sa famille sont contraints, par les nazis qui viennent d’envahir la Pologne, de s’installer dans le ghetto de Lodz. Des années plus tard, aux États-Unis où elle vit désormais, sa nièce écrivaine, Jennifer Roy, recueille son témoignage et décide d’en faire un livre, adressé aux enfants. Après quelques hésitations, elle choisit, pour transmettre le témoignage de sa tante, de raconter sa vie dans le ghetto, à la première personne et avec les mots d’une enfant de 5 à 10 ans. Encadré par une introduction, un épilogue, une bibliographie et émaillé de quelques explications écrites du point de vue de l’adulte auteure du livre, le récit est celui des souvenirs qu’une vieille femme a gardé de son enfance: parcellaires et parfois anecdotiques mais aussi pleins de lucidité. Et c’est tout l’intérêt de ce livre que de raconter, comme en creux, les grands mouvements de l’Histoire dont l’écho arrive jusqu’à Syvia sans qu’elle en comprenne toujours le sens.

C’est le récit poignant de l’enfance massacrée, où la lutte quotidienne pour la survie, dans un monde plongé dans le chaos, prend peu à peu le pas sur le jeu. Une enfance où l’insouciance n’a plus cours depuis longtemps. C’est à l’obstination et à la clairvoyance de son père que Syvia doit d’avoir survécu. Son témoignage est précieux comme celui de tous ceux qui ont traversé ces heures noires de l’Histoire. La forme retenue par Jennifer Roy, qui donne une voix à Syvia enfant*, en fait un document rare qui touchera les plus jeunes.

Ariane Tapinos (novembre 2010)

«Je ne comprends pas.
Comment peut-on tuer un autre être humain?
Clea me fait mal au cœur.
Je ne veux pas qu’un Allemand me remarque et qu’il se dise: "Une Juive!"
Parce qu’alors, je pourrais mourir, moi aussi

*Cette voix s’entend si bien à la lecture qu’on se dit que certains passages se prêteraient sans doute à une lecture haute voix…

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01/12/2010 | Lien permanent

Le Petit Homme et Dieu | album GENIAL de Kitty CROWTHER

petit homme dieu.gifÉd. Pastel, nov. 2010 - 12€

Un jour que Petit Homme se promène, il avise une chose qui lui déclare être «Dieu». À la question de Petit Homme intrigué, il répond qu’il n’est pas «Le Dieu» mais un dieu parmi les très nombreux qui peuplent le ciel et les étoiles. Et les voilà partis ensemble pour une promenade en forêt et une discussion pleine de surprises où l’on découvre que Dieu ne sait pas faire les omelettes mais qu’il apprend très vite. Qu’il ne sait pas nager mais peut marcher sur l’eau et qu’il veut bien faire la vaisselle. Qu’il ne ressemble pas à un vieillard à longue barbe blanche, mais qu’il peut se transformer en plein de créatures et même ressembler au père de Petit Homme.
Après avoir partagé un repas et une baignade dans le lac, Dieu et Petit Homme se séparent, transformés l’un et l’autre par cette rencontre. Dieu retourne dans son monde où l’attend sa femme, Femme, auprès de qui il devient Homme (et à qui il cuisine une omelette).
Comment parler de cet extraordinaire album sans employer les grands mots, sans gâcher par le commentaire, la finesse, la subtilité, l’intelligence et la poésie de ce livre merveilleux?

Qu’il suffise de dire que Kitty Crowther réussit à parler d’un sentiment intime et universel à la fois qui s’incarne dans ce drôle de personnage chaleureux, curieux et bienveillant accompagnant son Petit Homme. Ce Dieu, c’est un peu le Rien de la petite Lila dans le merveilleux Moi et Rien (éd. Pastel, 2002). C’est celui de chacun et non celui de tous. C’est une présence, un sentiment, une question. C’est un dieu qui ne réclame pas de fidèles ni d’églises mais qui fait émerger des désirs, des attentes.
Il promène sa bonhommie dans l’univers si particulier et si poétique de Kitty Crowther, auréolé d’une lueur orange (comme d’ailleurs certains animaux et le Petit Homme à la fin de l’album) qui illumine les pages du livre avec une très humaine et très tendre impression de feutre fluorescent.

Kitty Crowther a reçu le Prix Baobab 2009 et le Prix Astrid Lindgren en 2010. S’il ne tenait qu’à nous… on lui redonnerait les deux (et d’autres encore) en 2011!

Ariane Tapinos
(novembre 2010)


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21/11/2010 | Lien permanent

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