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AU TEMPS DE THÉÂTRE GREC. Journal de Cléo, Athènes 468 avant J.-C.
Roman
de Viviane KOENING
Éd. Gallimard Jeunesse, coll. Mon Histoire
Avril 2013, 143 pages – 9,50 €
Cléo est la fille du grand Cléandros, comédien réputé et maintes fois primé lors des Grandes Dyonisies au cours desquelles tragédiens et comédiens rivalisent de talent pour plaire au peuple d’Athènes. Habitué aux tragédies d’Eschyle, Cléandros découvre cette année un jeune auteur promis à la postérité : Sophocle. Le père de Cléo jouera Antigone (la pièce et le rôle titre ainsi que plusieurs autres personnages). Pour se préparer, il met à contribution sa fille qui se plonge avec bonheur dans la lecture de Sophocle et prend un grand plaisir à donner la réplique à son père. Plaisir partagé, puisque ce dernier lui propose bientôt de l’accompagner, travestie en jeune garçon (le théâtre est interdit aux Athéniennes, sur les planches comme sur les gradins). Les répétitions avancent et alors qu’un comédien est malade, Cléo, toujours sous le déguisement de Loulios, se retrouve à jouer avec son père devant le grand Sophocle !
Sous la forme d’un journal d’adolescente d’une lecture très accessible et très fluide, Viviane Koening entraine son lecteur (espérons que filles et garçons liront ce très bon roman) au cœur de la création d’une des plus grandes œuvre de la culture occidentale. Telle une petite souris projetée au siècle de Périclès, le lecteur accompagne Cléo dans sa vie quotidienne et dans sa découverte d’Antigone. Sans jamais alourdir l’histoire, Viviane Koening glisse de nombreuses informations sur la Grèce Antique, le théâtre, la place des femmes dans la société, le destin tragique des Labdacides…
Un roman qui pourrait bien séduire les enseignants autant que les enfants !
Ariane Tapinos (été 2013)
02/09/2013 | Lien permanent
Le Slip de bain | album de Charlotte MOUNDLIC & Olivier TALLEC (ill.)
Ou Les pires vacances de ma vie
Éd. Père Castor Flammarion | mai 2011
13 €
Michel («croyez-moi, c’est pas facile tous les jours de porter un prénom pareil») a «presque huit ans» et va passer, pour la première fois, des vacances sans sa maman. Une semaine – une longue semaine – à la campagne avec ses grands-parents et ses cousins dont Michel dit «pour faire simple, ils sont grands, forts (…) Je suis leur souffre douleur». Mais le pire est à venir: avant la fin des vacances, Michel doit sauter du plongeoir de 3 mètres, tradition familiale oblige. L’opération s’annonce doublement périlleuse: le plongeoir est bien haut et le «slip de bain» de Michel bien trop grand…
Un album qui sent le soleil, l’odeur de chlore et d’herbe sèche. Et, le vécu aussi: vacances à la campagne, cousins, piscine, vélo et orages d’été.
Racontées, au quotidien, par Michel-Charlotte Moundlic, ces vacances ont tout du récit initiatique. Michel doit affronter ses peurs (et celle que son maillot s’échappe lors du plongeon obligé n’est pas la moindre) pour grandir. Et les grandes vacances, c’est fait pour ça! Les illustrations, très, très réussies, d’Olivier Tallec, ajoutent à l’humour du texte et portent un regard plein de tendresse sur ces trois petits garçons maigrichons et leurs imposants grands-parents.
Le texte est long mais parfaitement calibré pour une lecture à faire tout seul à «presque huit ans» ou à se faire lire bien avant.
Ariane Tapinos (juin 2011)
10/07/2011 | Lien permanent | Commentaires (1)
POKA & MINE. AU CINÉMA
Aujourd’hui, Poka et Mine vont au cinéma. Ou plutôt : Le grand Poka, la petite Mine et six peluches s’envolent vers une joyeuse après-midi de découverte. Mine, aussi facétieuse qu’impatiente, veut essayer toutes les options : huit tickets et autant de sièges pour ses peluches (c’est leur première fois au cinéma !),un jus de fleur à la rose pour étancher sa soif, et des fourmis dans les jambes en attendant le film... Mine est à la fête, Poka déploie patience et attention et le plus important n’est pas où on l’attend !
Kitty Crowther a un talent inimitable pour dessiner avec humour et tendresse petits bonheurs et grandes découvertes de l’enfance. Sa séance de cinéma est délicieuse, toute parsemée de détails sûrement inspirés d’une grande pratique de la chose.
Amusez-vous à faire des allers-retours sur les pages présentant le public dans la salle et vous verrez que les insectes-spectateurs ont chacun leur histoire, leur façon d’aller au cinéma (il y a celui qui s’endort, le couple qui s’embrasse, les spectateurs du premier rang avec leurs gros yeux rivés sur l’écran, la dame qu’importune le bavardage de Mine, et le magazine « Hulp » qui passe demain en mains...) Enfin, si Poka n’a (presque) rien vu du film, on ne doute pas que l’auteure partage avec son héroïne son cri du cœur final : « J’adore le cinéma ! »
Corinne Chiaradia (première publication : décembre 2006).
01/04/2014 | Lien permanent
LES OISEAUX DE L'ESPOIR
Album de Judith LOSKE
Traduit par Julie DUTEIL
Éd. Minedition, oct. 2011 - 14 €
C’est l’histoire vraie de Sadako, une petite fille Japonaise. Chose étrange son histoire nous est contée par sa chatte.
Août 1945, bombardement d’Hiroshima, Sadako a deux ans et demi.
Dix ans plus tard, elle tombe malade. Hospitalisée, la petite fille réalise en pliage des grues de papier espérant ainsi recouvrer la santé, car au Japon les grues sont un symbole de longévité. Elles sont ensuite devenues aussi un symbole de paix.
Dans cet album priorité est donnée à l’illustration pleine page, d’un extrême raffinement dans les détails. Les couleurs sourdes et nuancées évoquent les estampes traditionnelles. Cependant, ne vous méprenez pas, le texte épuré traduit avec force au travers de la destinée de Sadako un fait historique avec toutes ses conséquences humaines et morales.
Les deux dernières doubles pages de l’album précisent le contexte temporel et culturel du récit.
Un livre d’une grande élégance et d’une grande pudeur qui permettra aux plus grands de réfléchir aux réalités du monde. Une valeur sûre à conserver précieusement dans sa bibliothèque.
Josuan (décembre 2011)
PS : L'histoire de Sadako a également donné un très beau roman, Les Mille Oiseaux de Sadako, d'Eleanor Coerr (réédité chez Milan en septembre 2011) et un albume d'Alain Serres et Claire Franek, Je fais un oiseau pour la paix (éd. Rue du monde, 2005).
20/01/2012 | Lien permanent
Villa des Oliviers | roman d'Anne VANTAL
Éd. Seuil Jeunesse, coll. Karactère(s) | juin 2009 | 142 pp. - 8,5O€
C’est l’été. Manon a quinze ans et comme chaque année, elle va passer trois semaines dans la maison de ses grands-parents, la Villa des Oliviers, où elle retrouvera ses tantes, ses oncles, ses deux cousines et son petit cousin. Mais cette année, c’est décidé, Manon sera désagréable (suite à une sombre histoire de cheville brisée de sa meilleure copine, Célia), elle restera silencieuse et s’emploiera à gâcher les vacances de ses parents. Mais les résolutions prises sous le coup de la colère sont les plus difficiles à tenir. Comment résister à la gentillesse de Mona, sa grand-mère (et à sa bonne cuisine) et au cou bronzé de Nicolas, le fils du jardinier?
De critique, Manon devient observatrice et se fait la chroniqueuse de ces vacances au soleil où chacun tente de composer entre collectif familial et intimité. Finalement, cet été sera tout sauf ennuyeux. Accidents, révélations, premiers émois amoureux (et première déception aussi)… Manon a matière à exercer son esprit critique, pour le plus grand bonheur du lecteur!
Sous une affreuse couverture (une pin-up anorexique prend un bain de soleil en maillot violet sur serviette turquoise) se cache un réjouissant petit roman sur le mode de la comédie familiale grinçante et tendre à la fois. Comme nous l’annonce la quatrième de couverture, Villa des Oliviers est «le portrait d’une adolescente qui voit s’éloigner son enfance» mais c’est aussi, en beaucoup plus drôle, un portrait de groupe dans lequel Manon (la narratrice) découvre que la vie des adultes est parfois aussi compliquée et mélodramatique que celle des enfants. Une comédie qui n’est pas sans rappeler un certain cinéma français, comme le film de Pascal Thomas, Les Maris, les femmes, les amants, avec ses réussites et aussi son côté très CSP-plus qui en agacera certains (mais pas nous!).
Ariane Tapinos (septembre 2009)
05/10/2009 | Lien permanent
LE POISSON ROUGE DE NANAMI
Traduit du japonais par Corinne Atlan
album - documentaire de Yuichi Kasano
Éd. L’école des loisirs, août 2016 - 12,70€
Vous êtes vous déjà demandé d’où venait le petit poisson rouge gagné à la kermesse ou à la fête foraine ? Si c’est le cas, voici un album qui va répondre à cette interrogation, du moins dans sa version japonaise !
Nous suivons donc Leo de sa naissance dans une ferme piscicole à son arrivée dans l’aquarium de Nanami. Et pour bien le repérer parmi ses nombreux congénères, une petite flèche rouge nous indique où il se trouve. D’abord dans le bassin où il va être pêché, puis à la criée où il sera acheté, avec quelques compagnons, par un marchand de poissons rouges, tout au long de son trajet en camionnette jusqu’au grand magasin de Tokyo et enfin, jusqu’à la fête de quartier où il va rencontré Nanami qui l’aura choisit parce qu’ « il ne ressemble à aucun autre ».
Vrai documentaire - vous saurez tout sur le commerce du poisson rouge au Japon - cet album est aussi une réjouissante promenade de la campagne à la ville et une plongée dans le Japon contemporain. Yuichi Kasano qui nous a déjà habitué à son talent pour raconter la vie à la campagne (Bonjour les vaches, 2012, Tous derrière le tracteur, 2011…) avec des images où la poésie se glisse dans le quotidien. Il réussit ici un album encore plus beau que les précédents et dans un format plus grand qui laisse plus de place à ses grandes images pleine de vie et de mouvements qui donnent au lecteur une position de surplomb sur ces aventures du quotidien.
Ariane Tapinos (octobre 2016)
26/10/2016 | Lien permanent
LA FRAISE
album
de Susumu SHINGU
{Pas de traducteur.trice crédité mais l’album vient du Japon}
Éd. Gallimard Jeunesse, mars 2018 - 14€
Douze ans après avoir publié deux albums de Susumu Shingu (que nous avions chroniqués), les éditions Gallimard Jeunesse nous font découvrir d’un coup, 3 albums de ce grand artiste japonais : Avec le soleil, Le voyage du vent (un sublime pop-up) et La fraise, son premier album, paru, au Japon, en 1975.
Ce dernier pourrait se résumer comme un album sur … le cycle de la fraise ! Des feuilles vertes au fruit mur, rouge avec ses « poinçons d’or » à l’extérieur et d’un blanc délicat à l’intérieur. Mais ce livre est bien plus que ça, bien sûr.
D’abord parce que comme l’écrit son auteur « La fraise est un paysage infini », ensuite parce que c’est le regard d’un artiste sur ce petit bout de nature que constitue ce fruit à la fois si beau et si goûteux.
Les images, d’une grande sobriété, sont infiniment délicates, éclairées par des couleurs d’autant plus tranchées qu’elles sont contourées de noir.
Il se dégage de cette lecture, comme de celle de tous les albums de Susumu Shingu, une grande sensualité, qui fait de sa lecture une véritable expérience artistique.
Ariane Tapinos (mars 2018)
A lire sur notre blog, la critique de L’Araignée et Les Petits Oiseaux.
21/03/2018 | Lien permanent
CŒUR DE HIBOU
Magnifique album
d’Isabelle WLODARCZYK
& Anne-Lise BOUTIN
Éd. Rue du monde, mai 2013
16,50 €
Une louve poursuivie par des chasseurs confie son nouveau né à un hibou, avant de mourir. Le hibou l’élève comme son petit. Il le nourrit, le couvre de feuilles séchées, joue avec lui… Son cœur chavire quand son petit loup prononce ses premiers mots, « mi-loup, mi-hibou » et c’est avec une tendresse mêlée d’inquiétude qu’il regarde grandir « son petit qui ne lui ressemble pas ».
Un jour, petit loup, voulant tout faire comme papa, s’élance du haut d’un arbre. La chute est rude et c’est son cœur qui est « un peu écorché » alors il s’enfuit loin dans la forêt. Heureusement, papa hibou retrouve son petit loup.
Cet album est exceptionnel à de nombreux égards. D’abord, les images d’Anne-Lise Boutin, avec ces beaux aplats de bleu et d’orange, ce vert vif du hibou et le noir profond du petit loup, sont d’une grande beauté. Ensuite il y a le texte d’Isabelle Wlodarczyk, tout en finesse et en tendresse. Un texte fait de mots simples qui disent l’amour réciproque d’un père et d’un fils. Enfin, il y a cette histoire à la fois toute simple, d’adoption, de filiation, de séparation et de retrouvailles et en même temps franchement audacieuse.
Il y a beaucoup (plus) de personnages masculins dans les albums mais si peu de papas qui s’occupent de leur progéniture. Ici, l’amour surgit « naturellement » dans le cœur du hibou dès qu’il a dans ses ailes ce nouveau-né que la vie lui a donné même s’il ne lui a pas donné vie. Ce père élève seul avec compétence et amour celui qui est devenu son fils. Certes, ils sont différents, « un jeune loup un peu hibou, et un vieux hibou au cœur de loup » mais ils s’aiment comme on aimerait que ce soit le cas dans toutes les familles.
Ariane Tapinos (été 2013)
20/07/2013 | Lien permanent
Deux albums de Martha ALEXANDER
Quand le nouveau bébé arrive, moi, je m’en vais
On ne m’a jamais demandé si je voulais une petite sœur
Traduits de l’américain par Dominique Mols
éd. Pastel | mars 2010 – 9€ chaque album
Ces albums sont une réédition - bienvenue - de livres parus aux éditions Duculot. Mais pourquoi donc ne pas le mentionner sur les nouvelles éditions ?
Dès le titre – à rallonge – de chacun de ces deux petits albums carrés, le décor est planté, le propos affirmé: Olivier ne voit pas d’un très bon oeil l’arrivée d’un bébé et ne sait vraiment pas quoi faire de cette petite sœur.
Il se découvre un intérêt soudain renouvelé pour ses propres affaires de bébé, que maman entend récupérer pour l'enfant à naître et il n’a pas du tout envie de céder son lit à barreau, transformé en cage pour ses animaux en peluche. Et si toutes ces manœuvres de maman montrent qu’elle ne l’aime plus, eh bien, il la mettra à la poubelle ou… il ira vivre dans une cabane dans un arbre.
Maman finira par le convaincre qu’être grand frère c’est plutôt agréable, avant que n’arrive cette petite sœur dont Olivier ferait bien cadeau à quelqu’un de son entourage. Si ce n’est que quand il trouve enfin une volontaire, sa petite sœur, elle, ne l’entend pas de cette oreille et pleure jusqu’à ce qu’Olivier la reprenne dans ses bras. Et le petit garçon de conclure «tu es drôlement plus intelligente que je ne pensais».
Deux albums dont on peut déjà dire, sans risque, qu’ils deviendront des classiques tant ils disent avec une économie de moyens et beaucoup d’humour, les sentiments ambivalents qui agitent les enfants lorsque la famille s’agrandit!
Ariane Tapinos (janvier 2010)
À lire de la même auteure, le génial
N'ai pas peur, Teddy! Je te protégerai des bêtes sauvages,
réédité récemment aux éditions Pastel.
01/02/2010 | Lien permanent
VA-T'EN, ALFRED !
album
de Catherine PINEUR
Éd. Pastel, mars 2015 – 9,70 euros.
Alfred est un drôle d'oiseau . Petit, rond, il traîne sa petite chaise verte de page en page à la recherche d'un nid où s'installer, car Alfred n'a plus de maison, on l'a chassé. Mais les oiseaux qu'il croise ont des maisons bien trop petites,trop fragiles ou bien trop hautes (il y a toujours une bonne raison...) et personne ne veut faire une place à un drôle d'oiseau comme Alfred. C'est alors que Alfred découvre la maison de Sonia, qui vit là, seule et cachée au fond des bois...
En quelques pages, Catherine Pineur nous livre avec une grande sobriété à la fois dans le texte et dans l'illustration cette tranche de vie d'un drôle d'oiseau que tous rejettent. Alfred, toujours en mouvement, tirant péniblement sa petite chaise verte, seul vestige de son passé trouvera-t-il un endroit où se poser ? Un très beau livre sur l'exclusion et la différence qui - si la situation d'Alfred ne résout pas - se clôt sur un moment d'espoir et de partage.
Nathalie Ventax (mars 2015)
22/03/2015 | Lien permanent