01/06/2010
En attendant New York | roman de Mitali PERKINS
Traduit de l’américain par Valérie Dayre
Éd. Thierry Magnier | coll Grands Romans | mai 2010 | 284 pp. - 18€
Inde années 70, Reet, Asha et leur mère s’installent à Calcutta, dans la famille de leur père, pendant que celui-ci, ingénieur au chômage, est parti chercher du travail à New York. Mais les mois passent et ce séjour forcé se prolonge. Reet, l’aînée, a dix-sept ans et c’est une belle jeune femme qui attire les regards et les prétendants. Tout l’inverse de sa sœur Asha qui, à seize ans, a abandonné depuis peu ses shorts et ses tenues de sport. Joueuse passionnée et talentueuse de tennis, elle a dû remiser (et même donner) sa raquette dès ce «Premier Sang» synonyme d'entrée dans sa vie de femme. Et une femme, dans l’Inde des années 70, ne montre pas ses jambes en haletant sur un court de tennis… Asha envie son cousin Raj, à peine plus âgé qu’elle, qui a lui le droit de faire du sport et de sortir de la maison. Elle s’indigne contre le sort qui lui est fait alors qu’en Europe et aux États-Unis, les femmes brûlent leur soutien-gorge, symbole de leur asservissement au pouvoir des hommes. Elle rêve de liberté et d’études de psychologie qui feraient d’elle la première psychologue punjabi.
Mais la route est longue pour atteindre New York et il n’est pas sûr que la sienne l’y conduise…
C’est un beau roman que celui de Mitali Perkins dont le style impeccable doit sans doute beaucoup à la qualité de la traduction de Valérie Dayre. Il y est question, avec beaucoup de finesse, de cet âge des possibles où les vies prennent un chemin, parfois inattendu, dans un pays où le poids des traditions laisse peu de place aux choix individuels. En même temps que se dessine l’avenir de Reet et d’Asha, celui de l’Inde moderne, dans un monde en plein bouleversement, s’esquisse. Leur famille n’est pas plus intolérante qu’une autre, juste engluée dans des règles sociales rendues en partie caduques par l’ouverture d’esprit dans laquelle les deux jeunes filles ont été élevées. Ces quelques mois passés dans la famille de leur père sont un peu la fin d’une époque, pour elles comme pour leur pays. Et c’est ce qui rend cette lecture si stimulante.
Ariane Tapinos, mai 2010
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