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25/02/2009

Orages | roman de Sonia RISTIC

orages.gifÉd. Actes sud junior, coll. Romans ado | octobre 2008 | 168 pp. – 11 €

1995. Tamara a une vingtaine d’années et poursuit sans conviction des études à Paris. Pour la première fois depuis quatre ans, elle s’apprête à partir pour Belgrade, sa ville natale. Elle doit hériter d’un lopin de terre, un bout de forêt dans la banlieue de Belgrade : elle n’en veut pas et redoute d’être confrontée à sa famille, ses souvenirs, sa vie « d’avant ». Trois ans que dure le siège de Sarajevo, et qu’elle se tient aussi éloignée que possible de la Serbie.
Rien dans ce voyage tant redouté ne se passera comme prévu et Tamara, très vite, se laisse porter par les événements et les sentiments qui la submergent…


Elle ne lutte pas, ne se révolte pas et accepte tout, y compris l’héritage encombrant, y compris sa fascination pour Alexandre, Sacha, son premier amour retrouvé par hasard, qui la révulse autant qu’il l’attire. Tamara aime celui qu’elle devrait fuir – Sacha n’a rien d’un enfant de cœur et trempe dans des trafics odieux – et repousse ceux qui l’aiment – son cousin Marko, sa sœur, sa famille. Il faudra des drames, plusieurs fuites encore – Paris, Istanbul – et des milliers de kilomètres pour qu’elle trouve une forme d’apaisement, de confiance en la vie, qu’elle « apprenne le bonheur». Il faudra des années pour qu’elle parvienne enfin, peur et colère digérées, à « retrouver » Belgrade et le fil de son histoire.

Dans sa très belle et très courte préface, Sonia Ristic – dont c’est le premier roman écrit pour la jeunesse – évoque l’éternelle question pour un auteur de savoir « d’où il écrit ». Elle nous dit : « J’écris de l’exil. Un exil volontaire, assumé, choisi, mais un exil tout de même ». Elle nous livre ses impressions , son « rêve-cauchemar de Belgrade […] Cette ville fantasmée avec laquelle j’entretiens des rapports complexes, ambigus, tissés de nostalgie, de deuils impossibles et de culpabilité dont tout exilé encombre ses bagages ». Si le style du roman est souvent beaucoup plus abrupt que cette note liminaire – mais les situations sont aussi exacerbées, la violence prégnante, les sens bouleversés – l’auteure est d’une grande justesse dans le rendu de cette complexité, nostalgie, désir, incompréhension et culpabilité mêlés. Son héroïne est pétrie de contradictions, alternant doutes et résolutions à toutes épreuve, aveuglement et lucidité, comportement autodestructeur (l’anorexie) et soif de vivre malgré tout selon ses désirs, ses nécessités intimes. Loin de l’exercice de style bien-pensant sur les dégâts « collatéraux » de la guerre en ex-Yougoslavie – quelques informations sont délivrées, mais ce n’est pas LE sujet du livre – Sonia Ristic nous livre un très beau parcours, chaotique, douloureux, mais finalement apaisé, d’une jeune femme à la recherche de son identité, par delà les frontières, les petites et grandes histoires, les mensonges et les silences.

Corinne Chiaradia (février 2009)

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