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15/03/2009

Ailleurs | trilogie romanesque de MOKA

9782211093392.jpgÉd. L'École des loisirs, coll. Médium  | janvier 2009 | 316 pp. - 11 €
Romans précédemment parus à L'École des loisirs sous les titres : Ailleurs rien n'est tout noir ou tout blanc (1991), Le Puit d'amour (1992), À nous la belle vie (1994).

À quinze ans, Frankie Avalon sait déjà bien ce qu'elle veut dans la vie – devenir pilote – et sa passion pour les avions lui fait accepter d'assez bonne grâce un déménagement à Seattle avec le reste de la famille, à savoir son père et sa sœur aînée, Constance. La découverte du pays ne se fait pas sans aléa : Seattle se révèle une ville grise et triste (malgré la présence d'usines Boeing et d'une école d'aviation !). Frankie, qui n'hésite pas à se lier, va découvrir une ville où racisme et préjugés règnent et où une étincelle suffit pour mettre le feu aux poudres. Cette étincelle, c'est le très populaire Linwood Forrester qui va l'allumer, avec ses discours racistes et sa manière de séduire même la naïve Constance…

 


Mais Frankie refuse qu'on lui embrigade sa sœur et puisqu'elle a muscles et bagoût à revendre, elle n'hésitera pas à dénoncer, à se battre et convaincre tout son petit monde de lutter contre la haine et la violence. Heureusement, elle n'est pas seule ! Et c'est avec l'aide du Major David King, officier dans l'armée de l'air (veuf, la quarantaine), que Frankie va s'engager dans la bataille… et découvrir aussi qu'elle est capable de tomber amoureuse !

La deuxième partie du roman nous entraîne vers le sud de la France où les filles Avalon passent des vacances mouvementées avec leur mère. C'est l'occasion pour Frankie de redécouvrir une femme avec qui elle ne s'est jamais entendue et à qui elle ne peut pardonner. Cette parenthèse tropézienne permettra également à Frankie de tester ses charmes…

Retour aux États-Unis pour le dernier volet : Frankie, furieuse d'être délaissée par le major au prétexte qu'elle est trop jeune, entraîne le fils de ce dernier – Lawrence – dans une virée à Las Vegas, qui tourne à la course poursuite quand elle prend sous son aile Dolorès, une fillette mexicaine sans papiers exploitée par son beau-père. Dans le train qui l'emmène vers Chicago où elle espère pouvoir régler la situation de la fillette, Frankie va découvrir une autre facette du pays: «Ma vision de l'Amérique jusqu'alors n'était guère flatteuse. Je ne la connaissais que sous son aspect violent, raciste et égoïste et voilà que je la découvrais sensible, généreuse et solidaire.»

On ne peut qu'apprécier l'initiative de l'éditeur d'avoir réuni dans cette nouvelle édition les trois volets des aventures de Frankie : on en comprend que mieux ce portrait d'adolescente. Les situations vécues par Frankie et sa famille sont proches dans les trois épisodes : il s'agit toujours pour la jeune fille de lutter contre l'injustice. Le sens de la justice de Frankie s'apparente d'ailleurs à la chevalerie : cette défense effrénée de la veuve et de l'orphelin l'entraîne parfois dans des situations dangereuses. Si Frankie est butée et n'hésite pas à se battre, elle va aussi peu à peu apprendre à écouter, à pardonner et surtout à aimer ; bref, à se construire et à évoluer sans renoncer à ses convictions. En réunissant les trois volets de ses aventures, les motivations, l'évolution du personnage et ses choix sont plus évidents quand on les lit d'une traite.

« J'ai commencé par un mot. Le mot "Ailleurs". Il m'intéressait. Ensuite, j'ai poursuivi : où, ailleurs ? C'est devenu le dialogue entre un père et sa fille. […] Ce qui m'amusait au départ, c'était de parler du racisme et de prendre le problème à l'envers. Plutôt que des personnages immigrés en France, des Français immigrés à l'étranger (en l'occurence aux États-Unis)»* Les difficultés de Frankie et de sa sœur à s'adapter dans une société qu'elles ne comprennent pas toujours, font écho à d'autres situations, d'autres personnages : pour n'en citer qu'un, l'inoubliable vieux «Ten ten spécial» qui a fui Soweto et l'apartheid avec son saxophone, pour finalement passer sa vie dans un train… L'exil est un thème prépondérant du roman. Si celui-ci n'est pas contraint pour la famille Avalon, il n'en reste pas moins que chacun doit se reconstruire après le bouleversement que constitue le déménagement. Il est difficile pour chacun des personnages de trouver (ou de retrouver dans le cas de la mère) leur place. Se faire de nouveaux amis, organiser la vie quotidienne sont autant de défis dans un ailleurs où il n'y a plus de repères. La lutte et les sympathies de Frankie pour ceux qui, comme elle, ont quitté leur environnement familier ne fait que témoigner du (relatif) désarroi qu'elle éprouve à devenir une étrangère.

Loin d'être désespéré, ce roman nous offre un beau portrait de cet exil fait de rencontres et de combats pour s'approprier un monde pas toujours très rose mais dans lequel chacun parvient à s'accepter et à accepter les autres, à se construire une vie «ailleurs»… pour le meilleur et pour le pire!

Nathalie Ventax (février 2009)

 

* Voir, dans la collection Mon écrivain préféré : Moka (École des loisirs, 2004)

Commentaires

extra!!!

Écrit par : Bonnie | 13/02/2014

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